Déjà considéré de son temps comme l’incarnation de l’académisme, Carl
Reinecke (1824-1910) reste aujourd’hui connu comme le professeur de
nombreux compositeurs passés par la fameuse «école de Leipzig» – Bruch,
Grieg et Janácek notamment. Pour autant, sa longue carrière dans
l’enseignement ne l’empêcha pas de composer abondamment pour le piano
(quatre concertos), en ancien virtuose de l’instrument, tout autant que
pour l’orchestre.
Sa dette à Mendelssohn et Schumann est patente, avec quelques rares passages au souffle brahmsien. La longue gestation de la Première Symphonie (1858-1870), remaniée plusieurs fois, ne doit pas en minorer l’intérêt, tant l’inspiration mélodique se montre supérieure aux symphonies ultérieures. L’Ouverture de l’opéra Le Roi Manfred (1866), ici agrémentée d’autres extraits charmants mais dispensables (Romance et Prélude du cinquième acte), reste également l’une de ses plus belles réussites, tout particulièrement dans la fluidité des idées, bien mise en valeur par le savoir-faire de l’orchestration. On pourra aussi se laisser séduire par la pompeuse mais efficace Marche triomphale de 1871.
Souvent considéré comme trop sage (voir notamment l’opéra chambriste Les Cygnes sauvages de 1881), Reinecke fait valoir une ambition autrement plus notable dans sa Troisième et dernière symphonie (1895), osant davantage dans l’entrecroisement des mélodies et l’ivresse sonore des cuivres. La version gravée par Howard Shelley pour Chandos en 2011, avec une meilleure prise de son et des tempi plus enlevés, se montre toutefois bien préférable au geste d’Henry Raudales, d’une bonne tenue d’ensemble, mais auquel il manque un rien de souffle. Un disque toutefois recommandable pour les œuvres «de jeunesse».