Véronique Gens |
La foule des grands soirs était réunie jeudi à Versailles pour célébrer
Charles Gounod autour de la résurrection de l’une de ses œuvres les plus
méconnues, Cinq-Mars. Ce grand opéra en quatre actes s’intéresse
à la figure historique du marquis de Cinq-Mars (1620-1642), ancien
favori de Louis XIII et auteur de nombreuses conspirations contre
Richelieu, avant de finir décapité à Lyon en même temps que son complice
François-Auguste de Thou. Si Meyerbeer a un temps caressé l’idée d’une
adaptation du roman écrit par Alfred de Vigny en 1826, c’est finalement
Gounod qui reprend cette idée pour l’un de ses derniers opéras, composé
en 1877, dix ans tout juste après Roméo et Juliette. L’œuvre
n’eut qu’une carrière modeste, et ce malgré l’existence d’une seconde
version présentée quelques mois seulement après la création. C’est
précisément cette version avec récitatifs (en lieu et place des
dialogues parlés), augmentée d’un Cantabile pour de Thou et d’un superbe
quatuor avec chœur, que l’on découvre à l’Opéra de Versailles, quelques
jours seulement après Munich et Vienne.
L’œuvre déçoit quelque peu d’emblée par une Ouverture aux thèmes peu saillants (il est vrai desservie par un Orchestre de la radio de Munich aux cordes bien timides), très séquentielle, impression qui persiste pendant la première demi-heure, lorsque le complot s’installe autour de récitatifs assez nombreux. Une fois passé ce démarrage en demi-teinte, Gounod captive constamment par sa variété de couleurs, alternant habilement airs et ensembles régulièrement soutenus par le chœur (très sollicité au niveau des pupitres masculins), tout en introduisant des danses dans la scène du bal au II, intrigue secondaire qui sert de prétexte à un divertissement léger. Le grand opéra laisse sans doute trop de place à l’amour contrarié entre Cinq-Mars et la Princesse Marie, manquant aussi la scène tragique de l’échafaud, assez sobre d’effets, que Gounod ponctue par un ultime cri de l’héroïne. Au premier acte, l’attention se concentre à partir de la scène V pour se délecter de la «Nuit resplendissante» de la Princesse Marie, l’un des airs les plus fameux de l’œuvre, entre poésie et délicatesse – qu’un Saint-Saëns n’aurait certainement pas renié.
Véronique Gens interprète une Marie tour à tour rêveuse puis amoureuse, toute de grâce dans ses différentes interventions. Comme à son habitude, la soprano française, régulièrement invitée à Versailles, distille toutes les subtilités de son timbre corsé autour d’une interprétation intense et théâtrale. Dans cette version de concert, les constants regards lancés à ses partenaires sont autant de signes d’une admirable volonté d’imposer le sens au-delà du seul chant. Dommage que Charles Castronovo, concentré sur la partition, ne réponde à ses intentions que très sporadiquement. Une imagination dramatique moindre qui ne l’empêche pas d’en imposer par son aisance vocale, très convaincante. Avec un timbre un peu assombri depuis sa belle prestation dans la Mireille donnée à Garnier voilà cinq ans, il offre à Saint-Mars les contours d’un homme plus mûr, plus «politique» que réellement éperdu d’amour pour Marie. La diction en français se montre quasi parfaite, à l’instar d’Andrew Foster-Williams, à la ligne de chant d’une tenue idéale, ou de Tassis Christoyannis, à l’éloquence toujours aussi radieuse. On pourra aussi citer la soprano Norma Nahoun, d’une fraîcheur délicieuse à chaque intervention, ou un superlatif Jacques-Greg Belobo. Un plateau vocal globalement de haut niveau, très investi.
Le Chœur de la Radio bavaroise ne faillit pas quant à lui à sa réputation, impressionnant surtout par sa diction parfaite du français. On pourra évidemment noter, ici et là, quelques prudences au niveau de l’intention dramatique, évidemment compensées par la cohésion et l’engagement de chaque instant. Ulf Schirmer dirige avec l’attention et la minutie caractéristiques de ce chef souvent présent à Bastille pendant l’ère Gall (Le Chevalier à la Rose, La Femme sans ombre ou Lulu). L’actuel directeur musical de l’Opéra de Leipzig conduit ses troupes avec une belle respiration, très à l’aise dans les passages dansés – seulement desservi, comme on l’a vu plus haut, par des cordes parfois peu audibles. Un spectacle vivement applaudi par un public visiblement ravi, encore une fois bien gâté par toute l’équipe du Palazzetto Bru Zane, à l’origine de ce beau projet.
L’œuvre déçoit quelque peu d’emblée par une Ouverture aux thèmes peu saillants (il est vrai desservie par un Orchestre de la radio de Munich aux cordes bien timides), très séquentielle, impression qui persiste pendant la première demi-heure, lorsque le complot s’installe autour de récitatifs assez nombreux. Une fois passé ce démarrage en demi-teinte, Gounod captive constamment par sa variété de couleurs, alternant habilement airs et ensembles régulièrement soutenus par le chœur (très sollicité au niveau des pupitres masculins), tout en introduisant des danses dans la scène du bal au II, intrigue secondaire qui sert de prétexte à un divertissement léger. Le grand opéra laisse sans doute trop de place à l’amour contrarié entre Cinq-Mars et la Princesse Marie, manquant aussi la scène tragique de l’échafaud, assez sobre d’effets, que Gounod ponctue par un ultime cri de l’héroïne. Au premier acte, l’attention se concentre à partir de la scène V pour se délecter de la «Nuit resplendissante» de la Princesse Marie, l’un des airs les plus fameux de l’œuvre, entre poésie et délicatesse – qu’un Saint-Saëns n’aurait certainement pas renié.
Véronique Gens interprète une Marie tour à tour rêveuse puis amoureuse, toute de grâce dans ses différentes interventions. Comme à son habitude, la soprano française, régulièrement invitée à Versailles, distille toutes les subtilités de son timbre corsé autour d’une interprétation intense et théâtrale. Dans cette version de concert, les constants regards lancés à ses partenaires sont autant de signes d’une admirable volonté d’imposer le sens au-delà du seul chant. Dommage que Charles Castronovo, concentré sur la partition, ne réponde à ses intentions que très sporadiquement. Une imagination dramatique moindre qui ne l’empêche pas d’en imposer par son aisance vocale, très convaincante. Avec un timbre un peu assombri depuis sa belle prestation dans la Mireille donnée à Garnier voilà cinq ans, il offre à Saint-Mars les contours d’un homme plus mûr, plus «politique» que réellement éperdu d’amour pour Marie. La diction en français se montre quasi parfaite, à l’instar d’Andrew Foster-Williams, à la ligne de chant d’une tenue idéale, ou de Tassis Christoyannis, à l’éloquence toujours aussi radieuse. On pourra aussi citer la soprano Norma Nahoun, d’une fraîcheur délicieuse à chaque intervention, ou un superlatif Jacques-Greg Belobo. Un plateau vocal globalement de haut niveau, très investi.
Le Chœur de la Radio bavaroise ne faillit pas quant à lui à sa réputation, impressionnant surtout par sa diction parfaite du français. On pourra évidemment noter, ici et là, quelques prudences au niveau de l’intention dramatique, évidemment compensées par la cohésion et l’engagement de chaque instant. Ulf Schirmer dirige avec l’attention et la minutie caractéristiques de ce chef souvent présent à Bastille pendant l’ère Gall (Le Chevalier à la Rose, La Femme sans ombre ou Lulu). L’actuel directeur musical de l’Opéra de Leipzig conduit ses troupes avec une belle respiration, très à l’aise dans les passages dansés – seulement desservi, comme on l’a vu plus haut, par des cordes parfois peu audibles. Un spectacle vivement applaudi par un public visiblement ravi, encore une fois bien gâté par toute l’équipe du Palazzetto Bru Zane, à l’origine de ce beau projet.
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