lundi 16 janvier 2023

« Grands Motets » de Charles-Hubert Gervais - Győrgy Vashegyi - Disque Glossa

Retenez bien le nom de Charles‑Hubert Gervais (1671‑1744) : sa musique est probablement l’une des grandes redécouvertes de ces dernières années, initiée voilà trois ans avec l’enregistrement de son plus célèbre opéra Hypermnestre (1717), déjà avec les forces conjointes de Győrgy Vashegyi et du Centre de musique baroque de Versailles (CMBV). L’intérêt pour l’un des compositeurs français les plus éminents du début du XVIIIe siècle trouve son origine dans l’éclairage donné pour la figure de Philippe d’Orléans, régent du royaume de France entre 1715 et 1723 et grand protecteur des arts, dont la musique de Gervais. On ne pourra ainsi que vivement conseiller la série de huit podcasts (dont trois réservés au public junior), créée en partenariat entre le CMBV, France Musique, la Comédie-Française et le Château de Versailles, afin de découvrir plus avant cette période méconnue (si l’on excepte en 1975, le film de Bertrand Tavernier, Que la fête commence..., et sa triade d’acteurs inoubliables, Noiret, Rochefort et Marielle).

Indissociable de la figure du Régent, qui lui fait gravir un à un les échelons à ses côtés, Charles‑Hubert Gervais s’est d’abord illustré exclusivement dans le domaine de l’opéra (aidant probablement le Régent dans sa propre initiative en ce domaine), avant d’embrasser la charge de sous‑maître de la chapelle de Louis XV, de 1723 jusqu’à sa mort, dédiant ainsi son inspiration à la musique religieuse. C’est précisément à cette partie de la carrière de Gervais, souvent mésestimée, que s’intéresse le présent disque. Hormis le Te Deum composé vers 1721, toutes les œuvres religieuses de Gervais ont été composées après 1723, sans qu’il soit possible de les dater précisément, faute de sources. Pour la composition de ses grands motets, Gervais se fond dans le moule magnifié par Richard de Lalande, tout en allégeant la pâte orchestrale et en faisant valoir ses talents de coloriste.


Son art de conjuguer don mélodique et situation dramatique s’impose dès l’introduction lente du psaume Exaudi Deus, d’une hauteur d’inspiration sensible et sans ostentation. L’hymne O filii et filiæ laisse entrevoir davantage de ferveur joyeuse, notamment par la virtuosité plus italienne des parties solistes. La musique de Gervais reste toujours d’une fluidité d’un naturel confondant, particulièrement dans l’intégration du chœur, souvent sollicité (parfait Chœur Purcell, d’une intensité toujours à propos). Plus imposant, le Te Deum recourt comme il se doit aux trompettes et timbales, concluant le disque en majesté. Outre la direction éloquente de Győrgy Vashegyi, l’enregistrement bénéficie d’un plateau vocal d’exception, dominé par les toujours expressifs Cyrille Dubois et Mathias Vidal, idéalement dans leur tessiture ici. De quoi faire de ce disque une des premières sensations de ce début d’année.

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