mardi 5 juillet 2022

« Mozart/Concert Aria’s » - Anne Teresa De Keersmaeker - Opéra des Flandres à Gand - 01/07/2022

Après nous avoir régalé de la reprise de Cosi fan tutte, l’Opéra des Flandres poursuit son hommage à la grande chorégraphe Anne Teresa De Keersmaeker (née en 1960), en reprenant l’un de ses plus beaux spectacles, Mozart/Concert Aria’s (1992). C’est là l’occasion de fêter l’enfant du pays, originaire de Malines, en lui faisant l’honneur d’une très attendue création belge, trente ans tout juste après le succès obtenu dans la cour d’honneur du Palais des Papes au Festival d’Avignon : on comprend rapidement pourquoi, tant le charme de ce spectacle opère d’emblée, en jouant des jeux de regards et de la malice entre les interprètes, tous en interaction constante.

Tout tourne autour du désir entre les êtres, qui se frôlent, glissent littéralement sur le sol en un ballet aérien, sautillant et léger. L’exploration du plateau par le groupe, en une volonté d’agencement géométrique, force l’admiration, même si De Keersmaeker cherche toujours à introduire une légère dissonance (un nombre de danseurs impair, une chute vite reprise, une interprète en pleurs, etc), comme pour rappeler que l’individualité ne doit pas s’oublier dans le collectif. Autour de mouvements toujours gracieux et poétiques, la pantomime, jamais envahissante, apporte une fantaisie bienvenue, au service d’un humour savamment distillé et sans ostentation. Le sens des transitions, comme de la fluidité jamais prise en défaut, est un régal constant, à l’image des nombreux changements de costumes (magnifique travail de Rudy Sabounghi à ce niveau, qui revisite et modernise les costumes d’époque avec malice), qui introduisent des ruptures de ton entre les scènes – le tout magnifiquement interprété par le ballet local, qui se hisse sans difficulté au niveau de la compagnie d’Anne Teresa De Keersmaeker.

Le plaisir vient aussi du choix des différentes musiques de Mozart, qui explore de nombreuses raretés peu entendues en concert, dont sa musique de ballet (rappelons que Mozart fut chargé de ce domaine à la Cour impériale d’Autriche), mais aussi des extraits d’airs pour soprani, accompagnés par l’orchestre ou le pianoforte. La variété à l’oeuvre n’oublie pas de donner à l’excellent Pedro Beriso une partie solo au pianoforte, où sa musicalité et son élan narratif font mouche. On aime aussi l’engagement constant d’Emma Posman, Annelies Van Gramberen et Raphaële Green, qui outre leur bon niveau vocal, démontrent des qualités interprétatives bienvenues dans leurs interactions savoureuses avec les danseurs. Ce spectacle très réussi, accueilli par un public enthousiaste à Gand, est à ne pas manquer, à l’occasion des prochaines reprises à l’automne, d’Anvers à Bruges, avant une fin de tournée prévue à Sankt Pölten (Autriche), avec les mêmes interprètes.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire