Thomas Hengelbrock |
Créé en 1978 sous l’appellation Ensemble orchestral de Paris,
l’Orchestre de chambre de Paris a vu l’arrivée en septembre dernier d’un
nouveau directeur musical, Thomas Hengelbrock (né en 1958). Ce
recrutement marque une étape importante dans la relation privilégiée
qu’entretient ce chef d’orchestre allemand avec la scène musicale
française. Hengelbrock, qui a été chef associé de l’Orchestre de Paris,
réside également à Fontainebleau avec son ensemble spécialisé dans les
instruments d’époque, le Balthasar Neumann, comme en témoigne un récent concert donné au Château.
Pour inaugurer sa saison, Hengelbrock a opté pour un
programme surprenant, en mettant en lumière deux compositeurs allemands
reconnus pour l’ampleur monumentale de leurs œuvres. Ce choix tranche
avec le répertoire traditionnellement associé à l’Orchestre de chambre
de Paris. La Sixième Symphonie (1881) de Bruckner, bien que conçue à une
période où les ensembles orchestraux étaient souvent imposants, repose
ici sur des effectifs réduits, dévoilant un caractère romantique et
intimiste qui semble particulièrement séduire Hengelbrock.
La première partie du concert était consacrée aux Métamorphoses
(1945) de Richard Strauss, une composition pour cordes exprimant la
douleur du compositeur face aux ravages de la Seconde Guerre mondiale en
Allemagne. L’habituelle richesse sonore de Strauss laisse place à une
atmosphère grave et introspective, évoquant des paysages en ruine. La
pièce, construite autour de motifs entrelacés, se distingue par sa
polyphonie complexe et dense. Les variations circulent d’un pupitre à
l’autre, offrant une musique en perpétuelle évolution, dominée par des
teintes sombres, avant de s’achever dans un unisson apaisant. En
dirigeant ses musiciens debout, Hengelbrock adopte une approche
minimaliste, évitant tout excès pathétique ou démonstration technique.
Progressivement, cette sobriété s’impose comme une force.
En seconde partie, le chef a continué de surprendre en
dirigeant par cœur. Sa lecture, marquée par l’absence de vibrato et des
tempi assez vifs, a donné à l’interprétation une légèreté certaine, bien
que les passages calmes aient parfois souffert d’un manque de richesse
et de contraste. Cette vision stylistique s’est révélée particulièrement
déroutante dans l’Adagio, qui a semblé fragmenté, et dans les
sections plus lyriques, où la brillance faisait défaut. Néanmoins, la
précision avec laquelle les crescendos et les transitions entre les
différentes parties ont été abordés s’est avérée remarquable, notamment
dans les deux derniers mouvements, joués sans interruption et portés par
une intensité croissante.
Parmi les différentes sections de l’orchestre, les cuivres,
et plus particulièrement les cors, ont brillé par leur excellence,
tandis que les clarinettes ont charmé par leur sonorité délicate et
aérienne. Cependant, c’est du côté des cordes, notamment dans les
mouvements lents, que l’ensemble devra progresser afin de gagner en
expressivité et en profondeur.
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