Mikko Franck |
Résumer la musique finlandaise à son seul compositeur emblématique Jean
Sibelius serait une erreur: c’est manifestement le message qu’a voulu
faire passer Mikko Franck (né en 1979), le jeune directeur musical du
Philharmonique de Radio France, en un concert entièrement dévolu au
répertoire de son pays. Quelques célébrités étaient présentes dans le
public, à l’instar de Pascal Dusapin et Esa-Pekka Salonen, son aîné
formé lui aussi à l’Académie Sibelius d’Helsinki, curieux de partager deux créations françaises avec le public.
Place tout d’abord au méconnu Joonas Kokkonen (1921-1996) et à «...durch einen Spiegel...» (1977), métamorphoses pour douze cordes et un clavecin, composées en 1977 et jamais entendues en France jusqu’à présent. L’ancien professeur de Leif Segerstam se montre ici influencé par le minimalisme, en un retour à la musique tonale qui avait dû surprendre lors de la création au festival de Lucerne. Aujourd’hui, l’effet est moindre même si l’on se délecte de l’expressivité enveloppante du tapis de cordes et des sonorités inquiétantes du clavecin qui rappellent parfois toute la fantaisie espiègle d’un Schnittke. Toujours attentif à la lisibilité, Mikko Franck n’en oublie pas pour autant d’insuffler un bel élan à cette musique qui croît et décroît en vagues régulières et souples. On regrettera cependant une sonorisation excessive, qui ne permet pas d’apprécier pleinement – au parterre tout du moins – l’effet spatial donné par la répartition des musiciens en arc de cercle.
Un orchestre beaucoup plus nombreux s’installe ensuite pour révéler le Deuxième Concerto pour violoncelle de Magnus Lindberg (né en 1958), créé voilà deux ans à Los Angeles. Présent dans le public et applaudi sur scène à l’issue du concert avec les interprètes, Lindberg fait partie de ces compositeurs plus hardis dans leur première période qui se sont assagis avec le temps, tel Krzysztof Penderecki, proposant désormais des œuvres plus tonales. En comparaison du Premier Concerto (1997-1999), l’orchestration fait appel à un ensemble moins fourni, tandis que la construction elle-même, avec la présence d’une cadence, se tourne résolument vers les modèles classiques. Si Mikko Franck évite toute emphase dans la première partie de l’œuvre, qui emprunte au style saturé de couleurs de Korngold, il se délecte ensuite des trouvailles orchestrales qui rappellent souvent Bartók par les sonorités. Anssi Karttunen (né en 1960) assure bien sa partie au violoncelle, même s’il semble montrer quelques limites dans l’ampleur des aigus. Son improvisation insolite en bis triture les cordes de son instrument, faisant sourire à maintes reprises un public peu habitué aux sonorités étriquées ici révélées.
Nouvelle surprise après l’entracte avec A Requiem in Our Time, une pièce pour cuivres et percussions seuls d’Einojuhani Rautavaara (né en 1928), composée en 1953 pendant ses années d’études. Le style résolument néoclassique de cette œuvre courte (dix minutes) en quatre parties rappelle en bien des endroits les atmosphères envoûtantes des Interludes marins de Britten, tout en empruntant parfois au Chostakovitch des années 1920, voire au constructivisme de cette époque. Comme à son habitude, Franck fait valoir ses qualités de mise en place et de respiration, relançant le discours avec beaucoup d’à-propos, sans se perdre dans les détails.
Un reproche que l’on pourrait parfois lui faire dans son interprétation de la Sixième Symphonie de Sibelius, où il se livre par endroits à une véritable radiographie de la partition, allégeant plus encore une œuvre qui n’a pourtant pas l’orchestration opulente des deux premières symphonies (voire de la Cinquième) du maître d’Ainola. La douceur et la sérénité qui se dégagent des premières mesures, lentement étagées, annoncent d’emblée la couleur: Mikko Franck s’empare de cette symphonie, se l’appropriant en jouant avec les tempi, faisant ressortir de nombreuses sonorités à tous les pupitres, accélérant par surprise tel le feu sous la glace. Une lecture aussi enthousiasmante que déroutante, aussi iconoclaste qu’indiscutablement personnelle. Il s’agit là sans doute de la marque des grands chefs, ceux qui vous donnent l’envie de lui faire confiance quel que soit le répertoire. De quoi rappeler à tous les absents, sans doute effrayés par ce programme 100 % finlandais, qu’ils ont eu bien tort de ne pas tenter ce voyage nordique à nul autre pareil.
Place tout d’abord au méconnu Joonas Kokkonen (1921-1996) et à «...durch einen Spiegel...» (1977), métamorphoses pour douze cordes et un clavecin, composées en 1977 et jamais entendues en France jusqu’à présent. L’ancien professeur de Leif Segerstam se montre ici influencé par le minimalisme, en un retour à la musique tonale qui avait dû surprendre lors de la création au festival de Lucerne. Aujourd’hui, l’effet est moindre même si l’on se délecte de l’expressivité enveloppante du tapis de cordes et des sonorités inquiétantes du clavecin qui rappellent parfois toute la fantaisie espiègle d’un Schnittke. Toujours attentif à la lisibilité, Mikko Franck n’en oublie pas pour autant d’insuffler un bel élan à cette musique qui croît et décroît en vagues régulières et souples. On regrettera cependant une sonorisation excessive, qui ne permet pas d’apprécier pleinement – au parterre tout du moins – l’effet spatial donné par la répartition des musiciens en arc de cercle.
Un orchestre beaucoup plus nombreux s’installe ensuite pour révéler le Deuxième Concerto pour violoncelle de Magnus Lindberg (né en 1958), créé voilà deux ans à Los Angeles. Présent dans le public et applaudi sur scène à l’issue du concert avec les interprètes, Lindberg fait partie de ces compositeurs plus hardis dans leur première période qui se sont assagis avec le temps, tel Krzysztof Penderecki, proposant désormais des œuvres plus tonales. En comparaison du Premier Concerto (1997-1999), l’orchestration fait appel à un ensemble moins fourni, tandis que la construction elle-même, avec la présence d’une cadence, se tourne résolument vers les modèles classiques. Si Mikko Franck évite toute emphase dans la première partie de l’œuvre, qui emprunte au style saturé de couleurs de Korngold, il se délecte ensuite des trouvailles orchestrales qui rappellent souvent Bartók par les sonorités. Anssi Karttunen (né en 1960) assure bien sa partie au violoncelle, même s’il semble montrer quelques limites dans l’ampleur des aigus. Son improvisation insolite en bis triture les cordes de son instrument, faisant sourire à maintes reprises un public peu habitué aux sonorités étriquées ici révélées.
Nouvelle surprise après l’entracte avec A Requiem in Our Time, une pièce pour cuivres et percussions seuls d’Einojuhani Rautavaara (né en 1928), composée en 1953 pendant ses années d’études. Le style résolument néoclassique de cette œuvre courte (dix minutes) en quatre parties rappelle en bien des endroits les atmosphères envoûtantes des Interludes marins de Britten, tout en empruntant parfois au Chostakovitch des années 1920, voire au constructivisme de cette époque. Comme à son habitude, Franck fait valoir ses qualités de mise en place et de respiration, relançant le discours avec beaucoup d’à-propos, sans se perdre dans les détails.
Un reproche que l’on pourrait parfois lui faire dans son interprétation de la Sixième Symphonie de Sibelius, où il se livre par endroits à une véritable radiographie de la partition, allégeant plus encore une œuvre qui n’a pourtant pas l’orchestration opulente des deux premières symphonies (voire de la Cinquième) du maître d’Ainola. La douceur et la sérénité qui se dégagent des premières mesures, lentement étagées, annoncent d’emblée la couleur: Mikko Franck s’empare de cette symphonie, se l’appropriant en jouant avec les tempi, faisant ressortir de nombreuses sonorités à tous les pupitres, accélérant par surprise tel le feu sous la glace. Une lecture aussi enthousiasmante que déroutante, aussi iconoclaste qu’indiscutablement personnelle. Il s’agit là sans doute de la marque des grands chefs, ceux qui vous donnent l’envie de lui faire confiance quel que soit le répertoire. De quoi rappeler à tous les absents, sans doute effrayés par ce programme 100 % finlandais, qu’ils ont eu bien tort de ne pas tenter ce voyage nordique à nul autre pareil.
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