jeudi 22 avril 2021

Oeuvres de Liszt, Schumann et Schoenberg - Trio Karénine - Disque Mirare

Après la réussite de son disque consacré à Chostakovitch, Dvorák et Weinberg (voir ici), le Trio Karénine poursuit sur sa lancée avec un enregistrement aux qualités multiples. Les qualités techniques individuelles, en premier lieu, permettent de se délecter d’un mélange d’intensité dans les tutti et d’un raffinement inouï dans la délicatesse des passages intériorisés, le tout au service d’une lecture dégraissée de toute lourdeur romantique. La prise de son détaillée n’est pas pour rien dans ce plaisir sonore continu. Le programme, enfin, montre à nouveau toute la curiosité du trio (formé en 2009) pour l’exploration d’un vaste répertoire, ici consacré à plusieurs adaptations d’œuvres bien connues.
 

On se réjouit ainsi de retrouver Liszt dans l’une de ses rares incursions dans le domaine de la musique de chambre, puisqu’il a lui-même réalisé en 1880 l’adaptation de «Vallée d’Obermann» – une pièce issue de la Première des Années de pèlerinage, composée plus de trente ans auparavant. Tristia comporte en réalité de nombreuses différences avec l’original pour piano solo, en privilégiant notamment les contrastes dans les échanges entre solistes.


On ne peut pas dire que les Six pièces en forme de canon (1845) de Schumann manquent de transcriptions, puisque autant Bizet que Debussy ont souhaité en exploiter les possibilités à quatre mains, tandis que Theodor Kirchner (1823-1903) se tournait vers celles du trio, en 1888. Cet ancien élève de Mendelssohn, grand amateur de pièces miniaturistes, se saisit admirablement de la poésie délicate de Schumann, inspiré par l’art de Bach.


Le disque se conclut avec la transcription de La Nuit transfigurée de Schoenberg réalisée par Eduard Steuermann (1892-1964). On y retrouve le toucher subtil du Trio Karénine, qui s’empare des moindres détails de la partition en un ton d’une étonnante sérénité, bien éloigné des dernières lueurs romantiques encore présentes dans l’ouvrage. Toute la modernité de ce premier chef-d’œuvre de Schoenberg ressort de cette interprétation superbe d’épure intériorisée, à l’image de ce très beau disque.


C’est là le tout dernier disque du Trio Karénine dans sa formation originelle, avec Fanny Robilliard au violon. Charlotte Juillard, premier violon de l’Orchestre philharmonique de Strasbourg et fondatrice du Quatuor Zaïde, la remplace en effet depuis le mois dernier. On attend avec impatience les fruits de cette nouvelle collaboration.

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