La vingt-huitième saison musicale des Invalides met à l’honneur le
peintre Antoine Watteau (1684-1721), dont on célèbre cette année le
trois centième anniversaire de la mort, en le reliant à l’un des plus
parfaits chefs d’œuvre de l’opéra-ballet français, Les Eléments
(1721). On retrouve le programme d’extraits concocté par Louis-Noël
Bestion de Camboulas et son ensemble sur instruments d’époque Les
Surprises à l’occasion du disque publié par les Editions Ambronay en 2019.
A peine une heure et quart de musique, mais quelle musique ! Si cette
version façon « opéra de chambre » privilégie logiquement les meilleurs
morceaux de l’ouvrage, en une nouvelle dramaturgie où les solistes
endossent alternativement tous les rôles, on se régale tout du long de
l’imagination mélodique, tout autant que de la variété des coloris
orchestraux et des climats. Si les nombreux passages pastoraux évoquent
Watteau, magnifiés par les flûtes aériennes, très présentes, on retient
aussi les envolées de caractère (orage notamment), admirablement
différenciées par le travail sur les percussions. Avec cet ouvrage qui
convoque toutes les ressources de l’orchestre, les musiciens semblent
prendre un plaisir sincère à faire vivre cette musique de toute leur
énergie communicative, le tout dans l’excellente acoustique des lieux,
sans trop de réverbération. Seul le clavecin, tenu par le chef, apparaît
malheureusement peu audible.
On retrouve les mêmes solistes qu’au disque, à l’exception de Jehanne
Amzal, qui remplace Elodie Fonnard. L’ancienne lauréate du Concours
international de chant Léopold Bellan, également deux fois lauréate de
la fondation de l’Abbaye de Royaumont, impose une composition lumineuse,
portée par des phrasés agiles et souples. A l’instar de sa comparse
Eugénie Lefebvre, le médium est moins soutenu, mais ce n’est là qu’un
détail à ce niveau. A ses côtés, Eugénie Lefebvre donne des accents
tranchants à ses interventions, faisant vibrer la nef de toute sa
puissance parfaitement maîtrisée. Elle sait aussi donner un visage plus
émouvant à son rôle, en dernière partie, avec beaucoup de finesse.
Enfin, Etienne Bazola compense une émission parfois voilée par une
noblesse de ligne éloquente, au service d’une diction et d’une attention
au texte particulièrement louables dans ce répertoire.
En bis, pour le plus grand bonheur de l’assistance, Les Surprises se
saisissent du fameux « Tambourin » de François Rebel et François
Francœur (extrait du Ballet de la paix de 1738), à la rythmique entraînante.
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