Déjà présentée avec succès à l’Opéra national de Lorraine en 2010 , la production de La Ville morte
réglée par Philipp Himmelmann fait son retour en France à Nantes
jusqu’au 17 mars, puis de nouveau à Nancy en avril prochain. Un
spectacle à ne pas manquer tant l’œuvre de Korngold se fait rare dans
l’Hexagone – on se souvient notamment de la superbe production viennoise
de Willy Decker reprise à l’Opéra de Paris, en 2009 déjà. Incontestable chef-d’œuvre de son auteur aux côtés de son Concerto pour violon,
cet opéra doit autant à Puccini qu’à Strauss, mais on y perçoit
également l’éblouissant talent d’orchestrateur qui permettra à Korngold
de réussir à Hollywood – notamment en tant que compositeur attitré du
réalisateur Michael Curtiz.
Comme Debussy, Korngold adapte une œuvre d’un auteur symboliste belge – Rodenbach remplaçant ici Maeterlinck. Mais là où le compositeur français embrassait les évanescences impressionnistes, l’Autrichien exalte les contrastes foisonnants de l’expressionnisme, autour d’un lyrisme généreux et débordant. De quoi apporter à cette Ville morte, au sujet bien grave, un sens du drame toujours passionnant, où l’orchestre joue un rôle majeur. En ce domaine, on saluera le travail de Thomas Rösner à la tête d’un Orchestre national des Pays de la Loire parfaitement affûté dans cette partition difficile et merveilleux de poésie dans les passages lents. On pourra juste souhaiter, après le rodage de la première dimanche, davantage de respiration dans les pages rapides et davantage de relief pour les cellules rythmiques répétées comme autant de leitmotivs entêtants – souvent en contraste avec la mélodie principale.
Sur scène, Philipp Himmelmann imagine un décor astucieux en superposant sur deux étages jusqu’à six modules qui reproduisent, en un fascinant effet de miroir, un appartement étriqué. Figurant l’incapacité de Paul à vivre autrement que par le souvenir de sa femme défunte, cette nudité spartiate n’est constituée que d’un unique fauteuil et son luminaire associé. En chaque espace ainsi délimité et reproduit à l’identique, les différents personnages de l’action agissent ensemble mais ne se croisent jamais – une idée qui permet au spectateur d’imaginer immédiatement la pirouette finale, à savoir que tous les événements à venir se déroule dans le seul esprit perturbé de Paul. Si la mise en scène de Willy Decker apportait une infinie poésie dans la rêverie, Philipp Himmelmann insiste quant à lui non plus seulement sur la dualité entre la nécessité de vivre et la tentation du renoncement, mais sur l’opposition ardente entre le vif désir pour Marietta et le respect de la mémoire de la défunte Marie. Dans cette optique, l’étalage quasi orgiaque du deuxième acte prend tout son sens, renforcé par la mise en avant du contexte religieux autour d’une Brigitta grimée en bonne sœur ou du regard halluciné de Paul lors de la procession au dernier acte.
La brillante distribution permet d’éviter l’écueil habituel de ce type de mise en scène, à savoir la froideur de ces mises en situation où les personnages ne se touchent pas, évoluant chacun dans leur espace clos. Helena Juntunen (déjà acclamée à Nancy voilà cinq ans) compose ainsi une vibrante Marietta, impressionnante de présence physique comme de brio vocal. Eloquence de l’expression, pureté de la ligne de chant, conviction dans l’émission, elle reçoit une ovation amplement méritée à l’issue de la représentation. A ses côtés, si Daniel Kirch (Paul) met un peu de temps à se chauffer autour d’une faible projection et d’un timbre un peu terne, ses relatives faiblesses entrent parfaitement en résonnance avec son rôle. En fin de compte, son investissement constant, sa noblesse de style tout comme la souplesse des phrasés satisfont pleinement. Si Allen Boxer se montre tout à fait convainquant, c’est surtout la superlative Brigitta de Maria Riccarda Wesseling qui apporte beaucoup de saveur à son rôle, seulement gênée par quelques aigus forcés. On retiendra aussi, dans cette très belle affiche, les superbes graves moirés de John Chest (Fritz).
Un plateau vocal très convaincant pour un trop rare Korngold à la scène. Assurément un spectacle à ne pas manquer en ce début d’année!
Comme Debussy, Korngold adapte une œuvre d’un auteur symboliste belge – Rodenbach remplaçant ici Maeterlinck. Mais là où le compositeur français embrassait les évanescences impressionnistes, l’Autrichien exalte les contrastes foisonnants de l’expressionnisme, autour d’un lyrisme généreux et débordant. De quoi apporter à cette Ville morte, au sujet bien grave, un sens du drame toujours passionnant, où l’orchestre joue un rôle majeur. En ce domaine, on saluera le travail de Thomas Rösner à la tête d’un Orchestre national des Pays de la Loire parfaitement affûté dans cette partition difficile et merveilleux de poésie dans les passages lents. On pourra juste souhaiter, après le rodage de la première dimanche, davantage de respiration dans les pages rapides et davantage de relief pour les cellules rythmiques répétées comme autant de leitmotivs entêtants – souvent en contraste avec la mélodie principale.
Sur scène, Philipp Himmelmann imagine un décor astucieux en superposant sur deux étages jusqu’à six modules qui reproduisent, en un fascinant effet de miroir, un appartement étriqué. Figurant l’incapacité de Paul à vivre autrement que par le souvenir de sa femme défunte, cette nudité spartiate n’est constituée que d’un unique fauteuil et son luminaire associé. En chaque espace ainsi délimité et reproduit à l’identique, les différents personnages de l’action agissent ensemble mais ne se croisent jamais – une idée qui permet au spectateur d’imaginer immédiatement la pirouette finale, à savoir que tous les événements à venir se déroule dans le seul esprit perturbé de Paul. Si la mise en scène de Willy Decker apportait une infinie poésie dans la rêverie, Philipp Himmelmann insiste quant à lui non plus seulement sur la dualité entre la nécessité de vivre et la tentation du renoncement, mais sur l’opposition ardente entre le vif désir pour Marietta et le respect de la mémoire de la défunte Marie. Dans cette optique, l’étalage quasi orgiaque du deuxième acte prend tout son sens, renforcé par la mise en avant du contexte religieux autour d’une Brigitta grimée en bonne sœur ou du regard halluciné de Paul lors de la procession au dernier acte.
La brillante distribution permet d’éviter l’écueil habituel de ce type de mise en scène, à savoir la froideur de ces mises en situation où les personnages ne se touchent pas, évoluant chacun dans leur espace clos. Helena Juntunen (déjà acclamée à Nancy voilà cinq ans) compose ainsi une vibrante Marietta, impressionnante de présence physique comme de brio vocal. Eloquence de l’expression, pureté de la ligne de chant, conviction dans l’émission, elle reçoit une ovation amplement méritée à l’issue de la représentation. A ses côtés, si Daniel Kirch (Paul) met un peu de temps à se chauffer autour d’une faible projection et d’un timbre un peu terne, ses relatives faiblesses entrent parfaitement en résonnance avec son rôle. En fin de compte, son investissement constant, sa noblesse de style tout comme la souplesse des phrasés satisfont pleinement. Si Allen Boxer se montre tout à fait convainquant, c’est surtout la superlative Brigitta de Maria Riccarda Wesseling qui apporte beaucoup de saveur à son rôle, seulement gênée par quelques aigus forcés. On retiendra aussi, dans cette très belle affiche, les superbes graves moirés de John Chest (Fritz).
Un plateau vocal très convaincant pour un trop rare Korngold à la scène. Assurément un spectacle à ne pas manquer en ce début d’année!
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