dimanche 21 octobre 2018

« Le Mariage secret » de Domenico Cimarosa - Opéra royal de Wallonie à Liège - 19/10/2018


Fidèle à son credo de présenter des « mises en scène qui respectent le public », c’est-à-dire éloignée de la regietheater à l’allemande, Stefano Mazzonis di Pralafera reprend l’un de ses tout premier spectacle présenté depuis son arrivée en 2007, en tant que directeur général et artistique de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège. La saison initiale de son mandat avait démontré tout son goût pour un répertoire italien délaissé, osant mettre à l’affiche Cherubini, Rinaldo di Capua et Cimarosa dans trois intermezzi savoureux, avant de rendre ensuite hommage à la gloire locale Gretry, avec Guillaume Tell et Zemire et Azor, notamment.

Avec cette reprise du Mariage secret, on ne se plaindra pas de retrouver l’incontestable chef d’oeuvre de Cimarosa, dont Rossini fit son miel, même si on aimerait aussi un intérêt plus poussé pour les autres ouvrages (plus de soixante-dix!) qui ont jalonné la carrière du Napolitain. Si la création de cette production, captée au dvd, avait fait appel à l’expérimenté Giovanni Antonini à la baguette, la direction est cette fois confiée à Ayrton Desimpelaere (né en 1990) dont c’est là la toute première production lyrique, après trois ans passés en tant qu’assistant chef d’orchestre à l’Opéra de Liège. Quelques décalages, sans doute dus au stress, sont audibles en première partie, avant de se résorber ensuite : gageons que les prochaines représentations sauront lui donner davantage d’assurance. Sa lecture privilégie des tempi allants qui mettent admirablement en valeur l’ivresse rythmique et le sens mélodique de Cimarosa, au détriment de certains détails peu fouillés, ici et là – délaissant le rôle de l’orchestre dans le piquant et la verve moqueuse. Peut-être qu’une opposition plus prononcée entre les différents pupitres de cordes aiderait avantageusement à stimuler un orchestre très correct, mais dont on aimerait entendre davantage la personnalité et le caractère.

Le meilleur de la soirée se trouve au niveau du plateau vocal, d’une très belle homogénéité, surtout chez les femmes. Malgré les quelques interventions décalées avec la fosse, Céline Mellon (Carolina / photo ci contre) s’impose au moyen d’une émission ronde et souple, permettant des vocalises d’une facilité déconcertante, autour d’une interprétation toute de charme et de fraîcheur. Sophie Junker n’est pas en reste dans le rôle de sa soeur Elisetta, donnant davantage de mordant et de couleurs en comparaison. Annunziata Vestri (Fidalma) fait valoir de beaux graves, malgré une agilité moindre dans les phrasés. C’est là le grand point fort de Patrick Delcour (Geronimo), par ailleurs irrésistible dans ses réparties comiques. Son timbre un peu fatigué convient bien à ce rôle de barbon moqué par tous ceux qui l’entourent. Matteo Falcier (Paolino) a pour lui une ligne gracieuse, tout en laissant entendre quelques imperfections dans l’aigu. C’est sans doute l’un des interprètes les moins à l’aise de la soirée avec Mario Cassi (Comte Robinson), seul rescapé de la production de 2008. Le baryton italien qui a chanté avec les plus grands (Abbado, Muti…), manque de projection, compensant cette faiblesse par une ligne de chant délicate et une interprétation toujours à propos.

On terminera rapidement sur la mise en scène de Stefano Mazzonis di Pralafera qui reprend décors et costumes à l’ancienne pour proposer un spectacle convenu et sans audace. S’il semble difficile de faire le choix d’une transposition ici, on aurait aimer davantage de folie et d’imagination, au moins au niveau visuel, à même de nous démontrer que cette histoire reste on ne peut plus actuelle. Quoiqu’il en soit, le travail proposé (particulièrement varié et réussi au niveau des éclairages) est d’une probité sans faille, acclamé par un public visiblement ravi en fin de représentation par les aspects bouffes mis en avant ici.

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