Fidèle à son credo de présenter des «
mises en scène qui respectent le public », c’est-à-dire éloignée de la
regietheater à l’allemande, Stefano Mazzonis di Pralafera reprend
l’un de ses tout premier spectacle présenté depuis son arrivée en 2007,
en tant que directeur général et artistique de l’Opéra Royal de
Wallonie-Liège. La saison initiale de son mandat avait démontré tout son
goût pour un répertoire italien délaissé, osant mettre à l’affiche
Cherubini, Rinaldo di Capua et Cimarosa dans trois intermezzi savoureux,
avant de rendre ensuite hommage à la gloire locale Gretry, avec
Guillaume Tell et Zemire et Azor, notamment.
Avec
cette reprise du Mariage secret, on ne se plaindra pas de retrouver
l’incontestable chef d’oeuvre de
Cimarosa, dont Rossini fit son miel, même si on aimerait aussi un
intérêt plus poussé pour les autres ouvrages (plus de soixante-dix!) qui
ont jalonné la carrière du Napolitain. Si la création de cette
production, captée au dvd, avait fait appel à l’expérimenté Giovanni
Antonini à la baguette, la direction est cette fois confiée à Ayrton Desimpelaere
(né en 1990) dont c’est là la toute première production lyrique, après
trois ans passés en tant qu’assistant chef d’orchestre à l’Opéra de
Liège. Quelques décalages, sans doute dus au stress, sont audibles en
première partie, avant de se résorber ensuite : gageons que les
prochaines représentations sauront lui donner davantage d’assurance. Sa
lecture privilégie des tempi allants qui mettent admirablement en valeur
l’ivresse rythmique et le sens mélodique de Cimarosa, au détriment de
certains détails peu fouillés, ici et là – délaissant le rôle de
l’orchestre dans le piquant et la verve moqueuse. Peut-être qu’une
opposition plus prononcée entre les différents pupitres de cordes
aiderait avantageusement à stimuler un orchestre très correct, mais dont
on aimerait entendre davantage la personnalité et le caractère.
Le meilleur de la soirée se trouve au niveau du plateau vocal, d’une très belle homogénéité, surtout chez les femmes. Malgré les quelques interventions décalées avec la fosse, Céline Mellon (Carolina
/ photo ci contre) s’impose au moyen d’une émission ronde et souple,
permettant des vocalises d’une facilité déconcertante, autour d’une
interprétation toute de charme et de fraîcheur. Sophie Junker n’est pas en reste dans le rôle de sa soeur Elisetta, donnant davantage de mordant et de couleurs en comparaison. Annunziata Vestri (Fidalma) fait valoir de beaux graves, malgré une agilité moindre dans les phrasés. C’est là le grand point fort de Patrick Delcour
(Geronimo), par ailleurs irrésistible dans ses réparties comiques. Son
timbre un peu fatigué convient bien à ce rôle de barbon moqué par tous
ceux qui l’entourent. Matteo Falcier (Paolino) a pour
lui une ligne gracieuse, tout en laissant entendre quelques
imperfections dans l’aigu. C’est sans doute l’un des interprètes les
moins à l’aise de la soirée avec Mario Cassi (Comte
Robinson), seul rescapé de la production de 2008. Le baryton italien qui
a chanté avec les plus grands (Abbado, Muti…), manque de projection,
compensant cette faiblesse par une ligne de chant délicate et une
interprétation toujours à propos.
On terminera rapidement sur la mise en scène de Stefano Mazzonis di Pralafera qui
reprend décors et costumes à l’ancienne pour proposer un spectacle
convenu et sans audace. S’il semble difficile de faire le choix d’une
transposition ici, on aurait aimer davantage de folie et d’imagination,
au moins au niveau visuel, à même de nous démontrer que cette histoire
reste on ne peut plus actuelle. Quoiqu’il en soit, le travail proposé
(particulièrement varié et réussi au niveau des éclairages) est d’une
probité sans faille, acclamé par un public visiblement ravi en fin de
représentation par les aspects bouffes mis en avant ici.
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