lundi 19 novembre 2018

« De la maison des morts » de Leoš Janáček - Théâtre royal de La Monnaie à Bruxelles - 16/11/2018


Déjà présentée à Londres en début d’année, avant Lyon l’an prochain, la production de De la maison des morts imaginée par Krzysztof Warlikowski fait halte à Bruxelles pour ce mois de novembre. Las, le metteur en scène polonais apparaît en toute petite forme, autant dans sa proposition esthétique cheap qu’au niveau des multiples provocations trash souvent incohérentes. Pourquoi affubler les personnages de masques blancs à plusieurs moments du spectacle ? Pourquoi nous infliger ces poupées gonflables, d’une rare laideur, à plusieurs reprises violentées par les chanteurs ?

Autour de ces questions laissées sans réponse, Warlikowski fait le choix d’une mise en scène ultravitaminée, façon cabaret, à mille lieux éloignée du travail de Patrice Chéreau (donné notamment à Aix et Paris). Si l’idée de donner davantage d’action à un livret trop statique peut bien entendu se concevoir, on regrette que cela se traduise par un surjeu constant, sans bénéficier de l’habituel sens esthétique propre au Polonais (comme le donnait encore à voir son remarquable spectacle Bartók / Poulenc repris à Garnier en début d’année). Dans la même idée, Warlikowski choisit de meubler les interludes orchestraux par des extraits vidéos de Michel Foucault, puis d’un anonyme – une idée intéressante mais trop survolée là aussi.


La transposition dans un pénitencier américain donne à voir des prisonniers aux attitudes vulgaires, auxquels la pratique du basket ball est réservée aux seules personnes de couleur noire – ce cliché ne pouvait-il pas être évité ? La scénographie intéressante avec ses multiples points de vue (plateau nu, couloir vitré en étage et bloc amovible) n’est qu’imparfaitement exploitée et seule la scène de théâtre dans le théâtre, malgré ses outrances et singeries, convainc quelque peu. On notera par ailleurs l’intéressante idée d’habiller dès le début du spectacle le personnage d’Alieïa en femme, ceci pour marquer les connotations homosexuelles de sa relation avec Gorjantchikov, ou encore celui de donner davantage de présence scénique à l’unique personnage féminin.

Autour de cette mise en scène peu inspirée, l’autre grande déception de la soirée vient de la fosse. Ivre de tempi dantesques, le chef allemand Michael Boder propose une lecture en noir et blanc qui ne s’intéresse qu’aux seuls crescendo dramatiques pour laisser de côté les contrastes lyriques et poétiques, peu audibles ici. Fort heureusement, le plateau vocal réuni affiche une belle cohésion d’ensemble d’où ressort l’intense Gorjantchikov de Willard White  ou le touchant Aljeja de Pascal Charbonneau. De quoi nous consoler les oreilles, à défaut des yeux !

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