Crée par l’English National Ballet en
2016, la Giselle chorégraphiée par Akram Khan (né en 1974) fait halte à
l’Opéra des Flandres sur l’invitation du directeur du ballet Sidi Larbi Cherkaoui.
Rien d’étonnant à cela tant les deux valeurs montantes contemporaines
de la danse se connaissent bien depuis leur création commune de Zero
degrees en 2005, un spectacle acclamé à travers le monde. Akram Khan
choisit cette fois de s’intéresser à la Giselle (dont le titre complet
est Giselle, ou les Wilis) d’Adolphe Adam, l’un des ballets les plus
fameux du répertoire, créée en 1841. Las, les amateurs de musique
romantique en seront pour leur frais puisque Khan ne garde de ce ballet
que le livret, laissant de côté la musique d’Adam pour lui substituer
celle de Vincenzo Lamagna.
C’est la deuxième fois que Khan fait
appel à ce compositeur basé à Londres, après Until the Lions créé à
Londres en 2016, puis à Paris à la Grande Halle de la Villette dans la
foulée. Sa musique accessible fait appel à de multiples références,
aussi bien bruitistes (nombreuses percussions, des bruits de verre aux
chaînes, etc) que tirées de mélodies traditionnelles : on remarquera que
le folklore celtique est ici très présent alors que les Wilis sont
issues de la mythologie slave. Cela étant, Adam n’avait pas non plus
cherché à se rapprocher de cette source musicale logique. Souvent proche
de la musique de film, la composition de Lamagna use et abuse de tics
d’écriture fatiguant à la longue, comme cet emploi des basses
quasi-omniprésent, dont les ostinato inquiétants en crescendo masquent
peu à peu une mélodie souvent simple en contraste dans les aigus.
Quelques belles idées permettent cependant un intérêt constant, tel que
cet emploi de la guitare électrique en résonnance afin de figurer la
sirène d’un cargo.
C’est surtout au niveau visuel que ce
spectacle emporte l’adhésion, autour d’éclairages admirablement variés,
dont on retient les contre-jours finement ciselés qui permettent de voir
les danseurs comme des ombres fugitives dans leurs allées et venues.
L’imagination de Khan permet des tableaux sans cesse renouvelés, en une
énergie revigorante toujours en mouvement mais très précise dans ses
scènes de groupe. C’est là l’une des grandes forces de ce spectacle, auquel Khan adjoint un mur en arrière-scène pour figurer la
problématique des migrants, évidemment absente de l’histoire originale.
Si l’idée ne convainc qu’à moitié sur le fond, elle est traitée de
manière magistrale au niveau visuel, notamment lorsque le mur tourne sur
lui-même comme suspendu dans les airs, tandis que l’ensemble de la
troupe du ballet de l’Opéra des Flandres affiche un niveau superlatif, à
l’instar du précédent spectacle vu l’an passé à Anvers.
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