dimanche 12 décembre 2021

« Cole Porter in Paris » par Christophe Mirambeau - Théâtre du Châtelet - 11/12/2021

Spécialiste reconnu de la comédie musicale et de l’opérette, Christophe Mirambeau défend ce répertoire depuis de nombreuses années, aussi bien dans ses travaux musicologiques que sur scène (voir notamment Normandie de Paul Misraki). On ne peut que se réjouir de son association avec l’ensemble Les Frivolités Parisiennes, qui n’a pas son pareil pour faire vivre de son énergie communicative cette musique piquante et enjouée, comme le prouve ce spectacle dédié aux sulfureuses années parisiennes de Cole Porter (1891-1964).

L’idée de Christophe Mirambeau consiste à sélectionner près de trente chansons issues de différentes comédies musicales (sans se limiter à celles écrites pendant la seule période parisienne), qui évoquent les « années folles » de Porter avec force malice et sous-entendus. C’est que Porter s’était fait une spécialité des textes à double sens, jouant des allusions à l’actualité ou à sa vie privée, dont seuls les initiés pouvaient démêler le sens caché (notamment le jeu de mot « top/bottom » de la chanson « You’re a top »). Protégé par un mariage de façade, Cole Porter mena, loin du regard de sa famille richissime, une vie parisienne dissolue, dont se fait l’écho le spectacle avec une joyeuse bonne humeur. C’est tout particulièrement la liaison avec le brillant librettiste des Ballets russes Boris Kochno (voir l’hommage qui lui a été rendu en 2001 au Palais Garnier), qui est mis au centre de l’attention en un virevoltant ballet entre les chanteurs qui alternent les différents rôles en fonction des tessitures convenant le mieux à leur voix. Le niveau global homogène, sans être exceptionnel, donne beaucoup de satisfactions, surtout côté féminin.

Aidés des danseurs qui revisitent les chorégraphies de l’époque, des extraits du savoureux Within the Quota monté par les Ballets suédois aux classieuses revues façon Fred Astaire, les interprètes s’en donnent à cœur joie pour le plus grand bonheur du public, qui applaudit pratiquement toutes les chansons. On est plus circonspect en revanche sur les qualités de metteur en scène de Christophe Mirambeau, qui peine à animer le vaste plateau du Châtelet par sa volonté d’une scénographie trop minimaliste, en hommage à l’art abstrait des années 1920. Quelques modules géométriques aux couleurs pastel rappellent Kandinsky ou Léger, tandis que l’inévitable grand escalier donne un peu de volume à l’ensemble. Le spectacle reste toutefois trop sage au niveau de sa direction d’acteur, engoncée dans son évocation trop soucieuse de réalisme historique – de même que les chorégraphies, un rien répétitives sur la durée.

Le spectacle reste néanmoins fort recommandable pour l’hommage sincère à Cole Porter, dont Mirambeau ose montrer la double facette heureuse dans les vernis d’apparat des salons et beaucoup moins dans l’intimité des alcôves, en mal d’amour.

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