Emmanuel Krivine |
Il fallait certes tendre l’oreille pour entendre Emmanuel Krivine (71
ans), tourné vers le public à l’issue du concert, mais quel plaisir de
se délecter de la malice du chef français, mi-sérieux, mi-goguenard,
lorsqu’il remercie le public pour sa présence et son soutien au Festival
de Radio France Occitanie Montpellier, y compris lorsque la
programmation le conduit vers des «compositeurs aux noms aussi imprononçables que Schreker, Martucci ou Zemlinsky»!
Est-ce là une allusion à la difficulté de consacrer un concert entier à
George Gershwin (1898-1937), compositeur américain encore sous-estimé
en France par les suiveurs de Pierre Boulez et bien au-delà? Quoi qu’il
en soit, la notoriété de Gershwin suffit à faire de ce concert un
événement donné à guichet fermé et retransmis en direct sur France
Musique, débutant par le brio orchestral de l’Ouverture cubaine (1932).
Comme il est d’usage pour cette pièce, Krivine place à l’avant les quatre percussionnistes chargés de donner la couleur cubaine avec leurs instruments typiques (bongo, claves, gourdes et maracas), donnant ainsi une place prépondérante au coloris par rapport à la mélodie. Ce sera là une constante dans les autres pièces dévoilées tout au long de la soirée, avec une vision analytique dans les passages lents qui donne beaucoup de détails savoureux et inattendus, faisant ressortir les contrechants sur le même plan que la mélodie principale. Krivine a aussi tendance à accélérer les passages rapides, jouant ainsi sur le tempo en une lecture à rebours des interprétations traditionnelles. Un tel parti pris favorise les bons connaisseurs de Gershwin, tandis que le public profane sera un peu plus dérouté s’agissant des œuvres moins immédiatement accessibles, tel que le Concerto pour piano en fa (1925).
Comme il est d’usage pour cette pièce, Krivine place à l’avant les quatre percussionnistes chargés de donner la couleur cubaine avec leurs instruments typiques (bongo, claves, gourdes et maracas), donnant ainsi une place prépondérante au coloris par rapport à la mélodie. Ce sera là une constante dans les autres pièces dévoilées tout au long de la soirée, avec une vision analytique dans les passages lents qui donne beaucoup de détails savoureux et inattendus, faisant ressortir les contrechants sur le même plan que la mélodie principale. Krivine a aussi tendance à accélérer les passages rapides, jouant ainsi sur le tempo en une lecture à rebours des interprétations traditionnelles. Un tel parti pris favorise les bons connaisseurs de Gershwin, tandis que le public profane sera un peu plus dérouté s’agissant des œuvres moins immédiatement accessibles, tel que le Concerto pour piano en fa (1925).
Louis Schwizgebel |
Pour autant, Krivine impressionne par sa capacité à relancer le discours
après ses incursions dans le détail – suivi en cela par un Orchestre
national de France d’une discipline remarquable. Le chef français se
permet aussi quelques effets de spatialisation avec la répartition des
timbales et de la grosse caisse à l’un et l’autre bout de la scène, ceci
pour offrir des effets de réponse en écho. Dommage que le piano un peu
trop tendre du Suisse Louis Schwizgebel (30 ans) paraisse bien lisse en
comparaison. C’est surtout audible dans les mouvements rapides, alors
que les passages lents lui conviennent mieux grâce à son toucher félin
et gracieux. De son côté, Krivine tourne Gershwin vers le raffinement
orchestral de Ravel, allégeant les textures et faisant notablement
ressortir le rôle des bois. A ce jeu-là, la musique de Gershwin apparaît
plus moderne, ce qui est encore plus visible dans l’étirement de la
mélodie irrésistible du tout début d’Un Américain à Paris (1928). Un même ralentissement est opéré avec la Rhapsody in Blue
(1924), dont on doit l’orchestration jazzy à Ferde Grofé. Les cuivres
se montrent volontiers narquois ici, même si la sonorité des klaxons
joue peu des effets possibles de verticalité, ceci pour garder l’élan
narratif global.
Visiblement ravi de sa présence à Montpellier, Krivine reprend la toute fin d’Un Américain à Paris en guise de bis. Maintenant que le verrou Gershwin a sauté, l’Orchestre national de France et son directeur musical oseront-ils ajouter à leur répertoire La Nuit des Mayas de Silvestre Revueltas (1899-1940) et son finale dantesque de percussions mexicaines?
Visiblement ravi de sa présence à Montpellier, Krivine reprend la toute fin d’Un Américain à Paris en guise de bis. Maintenant que le verrou Gershwin a sauté, l’Orchestre national de France et son directeur musical oseront-ils ajouter à leur répertoire La Nuit des Mayas de Silvestre Revueltas (1899-1940) et son finale dantesque de percussions mexicaines?
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