Lancée en 2014 avec Amadis de Gaule de Jean-Chrétien Bach,
la collection «Opéra français» continue de s’intéresser au genre de la
tragédie lyrique encore très apprécié dans les années 1790. Après Les Danaïdes de Salieri,
les équipes du Palazzetto Bru Zane nous font découvrir le méconnu
Jean-Baptiste Lemoyne (1751-1796), qui fit une partie de sa carrière en
Allemagne, en tant que second maître de musique à la cour de Prusse.
Proche de Gluck, sa musique fut parfois jugée un peu raide par ses
contemporains, mais on ne peut lui contester une grande efficacité
dramatique, comme en témoigne la version réduite de Phèdre (1786) donnée ici
au Théâtre des Bouffes du Nord avec Julien Chauvin à la direction. Ce
spectacle produit par le Palazzetto Bru Zane avait bénéficié de
plusieurs aménagements par rapport au présent disque, réduisant
l’ouvrage à l’essentiel avec la suppression des rôles secondaires: la
charge émotionnelle ainsi obtenue avait pleinement justifié sa
présentation sur scène.
Avec cet album, aucune coupure ne viendra fâcher le puriste, tandis que
l’on retrouve l’orchestration originale dirigée, cette fois, par le
geste un rien statique du chef hongrois Győrgy Vashegyi. Rescapée du
plateau vocal réuni aux Bouffes du Nord, Judith van Wanroij illumine
chacune de ses interventions de son timbre toujours aussi superbe de
profondeur et d’intensité, porté par un engagement de tous les instants.
A ses côtés, Julien Behr assure l’essentiel, et ce malgré une émission
souvent trop serrée, tandis que Tassis Christoyannis met en valeur ses
qualités de diction et d’articulation, faisant oublier le peu de
couleurs qu’il lui reste. Parmi les seconds rôles, le toujours
impeccable Jérôme Boutillier se distingue par sa musicalité, prenant le
dessus sur ses partenaires féminines, Melody Louledjian et Ludivine
Gombert, à l’émission instable dans le suraigu. Le chœur hongrois
Purcell surprend encore par sa maîtrise quasi parfaite du français,
donnant beaucoup de satisfactions tout du long.
Du fait de ses qualités théâtrales, l’ouvrage de Lemoyne mérite d’être
découvert en priorité sur scène: il reste toutefois très agréable à
l’écoute au disque, malgré une orchestration un peu froide et quelques
redites.
Parce que la culture se conjugue sous plusieurs formes, il sera sujet ici de cinéma, de littérature, de musique, de spectacles vivants, selon l'inconstante fantaisie de son auteur
lundi 7 septembre 2020
« Phèdre » de Jean-Baptiste Lemoyne - Győrgy Vashegyi - Disque Glossa
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