lundi 22 juillet 2019

« Tancredi » de Gioacchino Rossini - Festival de Bad Wildbad - 20/07/2019

Kurtheater
A l’occasion d’une visite au festival de Bad Wildbad, il faudra absolument choisir l’un des concerts organisés dans le cadre du Kurtheater, un charmant théâtre d’époque, construit en 1888 lors des grandes heures de la station thermale. Sa petite jauge d’environ 200 places rappelle son équivalent à Buxton, autre ville de bains qui accueille un festival lyrique de renom et qui bénéficie également d’une excellente acoustique. Plusieurs concerts se tiennent ici pendant le festival, de la musique de chambre (avec notamment le Trio Zedda déjà présent l’an passé) aux ouvrages lyriques de plus ou moins grande importance. On ne pourra qu’inciter à découvrir la nouvelle production de Tancrède (1813), donnée cette année dans sa version de Ferrare: son final ne se contente pas d’émouvoir par son dénouement tragique, mais se permet de surprendre par la raréfaction du tissu musical – une audace pour l’époque.

Il revient à Diana Haller d’affronter le redoutable rôle-titre, jadis incarné par Marilyn Horne, avec un aplomb digne des plus grandes tout du long de la représentation. Son engagement et sa sincérité d’interprétation lui valent des applaudissements nourris, même si l’on est plus réservé concernant sa technique vocale, soutenue par un vibrato certes léger mais constant. En dehors de cette réserve stylistique, la beauté du timbre et la facilité des sauts de registre séduisent, tandis que sa confrontation avec Elisa Balbo (Amenaide) tient la route, notamment dans leur touchant duo au II: du fait d’une émission parfois étroite dans les passages difficiles, la soprano a un aigu un peu dur, mais qui convient bien aux nécessités du rôle. Les graves superbes, tout comme les nuances piano, lui permettent de toucher au cœur après l’entracte, lorsque le drame se tend.

Diana Haller et Elisa Balbo

Patrick Kabongo semble moins à l’aise que la veille pour interpréter la vaillance et l’éclat requis pour Argirio. Il reste toutefois l’une des meilleures satisfactions de la soirée pour le naturel et la délicatesse de ses phrasés et la délicatesse, tandis qu’Ugo Guargliardo compose un Orbazzano plus premier degré, à l’émission puissante, mais peu détaillée dans les graves grasseyants. Diletta Scandiuzzi (Isaura) assure bien sa partie, malgré un positionnement de voix parfois instable. Elle reste toutefois au-dessus de la prestation de Claire Gascoin (Ruggiero), au timbre agréable, mais à la technique encore fragile à ce niveau.

Le Chœur de chambre Górecki montre un bon niveau d’ensemble, malgré un côté «brut de décoffrage» accentué par la direction peu subtile d’Antonino Fogliani dans les passages guerriers au début, qui n’évite pas des niveaux sonores trop appuyés. Il est dommage que le chef n’ait pas davantage pris en compte l’acoustique de la salle, très sonore à l’instar de la Trinkhalle voisine. Fort heureusement, Fogliani se rattrape par la suite dans les climats plus torturés au II, en montrant une sensibilité bienvenue.

On mentionnera enfin rapidement la mise en scène sobre et efficace de Jochen Schönleber, à la tête du festival de Bad Wildbad depuis 1992, qui donne des allures sombres et futuristes à sa scénographie. Assez intemporelle, sa proposition se joue habilement de l’étroitesse de la scène en gagnant en profondeur de champ avec une prison figurée en arrière-scène, qui s’ouvre et se ferme au gré de l’action. Rien de très innovant, mais cette proposition scénique bien variée par les éclairages permet de se concentrer sur les drames individuels avec intensité.

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