mardi 21 février 2023

« Tom Sawyer » de Kurt Weill - Tobias Ribitzki - Opéra Comique de Berlin - 18/02/2023

Prématurément décédé, Kurt Weill n’a pu terminer sa comédie musicale Tom Sawyer (1950), qui a été achevée en 2020 par le chef d’orchestre Kai Tietje (également présent dans la fosse berlinoise), avec l’adjonction de chansons du même compositeur. La salle comble pour cette première montre la confiance du public pour la qualité des spectacles proposés au Komische Oper depuis plusieurs années, pour tous les âges. La concentration des plus jeunes, dès le début du spectacle, force l’admiration : les rythmes enjoués des fanfares de Weill, aux accents narquois aux cuivres (en mode sourdine jazzy), provoquent déjà quelques rires et montrent toute l’étendue de l’imagination d’un compositeur au fait de ses moyens, variant les climats comme son maître Busoni (voir notamment son Doktor Faust, récemment monté à Florence).

Les mélodies volontiers sucrées caressent les jeunes têtes blondes dans le sens du poil, y compris dans les dialogues soutenus par plusieurs instruments aux sonorités populaires (banjo, etc). Interprété entièrement en allemand, l’ouvrage ne bénéficie pas des habituels sous‑titres en plusieurs langues (dont le français) sur le siège devant soi, faisant ainsi perdre la compréhension des nombreuses réparties humoristiques pour le non‑germanophone. L’action, très lisible, reste toutefois accessible en reprenant le déroulé des péripéties bien connues : ainsi des tendres remontrances de la tante Polly pour les velléités d’école buissonnière de Tom et Huck, avant l’arrivée de la ravissante Becky et du sournois Killer‑Joe, deux grains de sable perturbateurs de l’équilibre de la petite communauté rassemblée autour du Mississippi.

La mise en scène de Tobias Ribitzki épouse le rythme de l’action en plaçant la direction d’acteur au premier plan, tout en montant et démontant à vue les rares éléments de décors au gré des différentes saynètes. La simplicité sans ostentation qui se dégage de ce travail centré sur les interprètes trouve une sorte d’évidence joyeuse, collant parfaitement à la malice humaniste de Mark Twain. Ainsi du très fourni chœur d’enfants, qui embrasse un large éventail d’âges, aussi réjouissant d’enthousiasme communicatif qu’impressionnant de qualité technique. C’est là un des habituels points forts de l’interprétation musicale en Allemagne, et plus encore ici à Berlin. D’une grande cohésion jusque dans les moindres seconds rôles, la distribution est dominée par Tom Schimon (Tom) et Michael Heller (Huck), qui font valoir autant la beauté de leur timbre que le sens de la gouaille attendu. Enfin, Kai Tietje apporte son sens du swing à l’ensemble, montrant aussi beaucoup de sensibilité dans les passages apaisés.

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