mercredi 1 février 2012

« Rose » de Martin Sherman - Théâtre Pépinière - 24/01/2012

Le théâtre La Pépinière présente l’une des pièces méconnues de Martin Sherman, l’auteur du magnifique « Bent ». Seule sur scène, Judith Magre déçoit de bout en bout.
Judith Magre
Années 1960. De l’Odéon à Avignon, de Chaillot à l’Athénée, Judith Magre est de toutes les scènes prestigieuses, dirigée par Jean-Louis Barrault, Jean Vilar ou Georges Wilson. Le cinéma n’est pas en reste. René Clair, Julien Duvivier, Louis Malle et surtout Claude Lelouch lui offrent des rôles à la mesure de son caractère et de son talent. Fidèle au théâtre, la comédienne retrouve le succès dans les années 1980 avec Jean-Michel Ribes, puis Jorge Lavelli, avant que ses pairs ne lui décernent le prestigieux molière de la Meilleure Comédienne en 2000 et 2006.
Extrêmement active, Judith Magre travaille chaque année sur un nouveau projet. Une énergie étonnante pour une femme qui vient de fêter ses 85 ans en novembre dernier. Son choix s’est porté cette année sur Rose, l’une des pièces de l’Américain Martin Sherman, bien connu grâce à Bent, son immense succès. Écrite en 1979, cette pièce a fait le tour du monde, traduite dans plus de vingt langues, puis adaptée au cinéma avec Clive Owen, Ian McKellen et… Mick Jagger dans les rôles principaux.
Depuis cette incontestable réussite, Martin Sherman s’est fait plus discret, écrivant moins d’une dizaine de pièces en vingt ans et quelques rares scénarios pour le cinéma, notamment pour Stephen Frears. Grand succès critique, la pièce Rose, présentée en 1999 au Royal National Theatre de Londres est nommée aux Laurence Olivier Awards l’année suivante. Martin Sherman réussit en effet à brosser le portrait émouvant d’une rescapée du ghetto de Varsovie, qui des États-Unis à Israël, nous raconte son histoire avec une malice et un humour ravageurs. Au soir de sa vie, la vieille Rose se souvient et nous transporte dans son passé tumultueux.
Une nonchalance hors de propos
Rien de cela sur la petite scène du théâtre La Pépinière. Tout occupée à lutter contre son texte, Judith Magre a bien du mal à incarner son personnage. S’enfermant dans un débit métronomique, peu habité, nonchalant, la fantaisie de son personnage ne semble pas l’intéresser, tout comme les ruptures qui rythment le récit. On passe ainsi du comique au tragique sans que la comédienne ne marque véritablement de différence dans le ton ou l’émotion de sa voix. Judith Magre s’éveille quelque peu en deuxième partie, lorsque son personnage foule le sol d’Israël, mais l’intensité d’un moment cède vite à la routine déjà constatée.
Il faut dire que la mise en scène minimaliste de Thierry Harcourt n’aide pas non plus à dynamiser la comédienne. Assise sur un banc pendant la quasi-totalité du spectacle, Judith Magre semble laissée à elle-même, comme abandonnée. Les éclairages, tout aussi sobres, ne l’aident pas davantage. Un panneau vertical capte ainsi la lumière, passant du violet au rouge pour signifier la violence du récit, ou revenant au bleu lorsque vient l’apaisement.
Pour les spectateurs, l’ennui s’installe durablement, à peine distraits par la belle musique composée par Éric Slabiak qui évoque subtilement l’Europe centrale et les origines ashkénazes de Rose. Judith Magre en termine. Elle nous a déjà perdus depuis longtemps.

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