Pour sa vingt-septième édition, le Festival du Haut Limousin organisé
par la Ferme de Villefavard propose de nombreuses manifestations
originales (dont des balades musicales urbaines), appelées à faire vivre
la culture sur un territoire de tradition agricole. Il fallait
certainement de l’audace pour imaginer qu’un village de 164 habitants
puisse accueillir l’un des festivals les plus attachants de la région,
tout autant qu’une résidence d’artistes et un lieu d’enregistrement
discographique renommé (voir notamment l’album « Tyrannic Love » en 2022).
Dans les pas prestigieux de l’abbaye d’Ambronay, la Ferme de Villefavard
en Limousin est devenue en 2022 le vingtième lieu français à recevoir
le label « Centre culturel de rencontre », qui permet de donner une
nouvelle destination à des monuments historiques ayant perdu leur
vocation d’origine : ainsi de cette « ferme modèle » à sa création, dont
les méthodes préindustrielles avaient pour but d’améliorer les
conditions de vie des paysans. Créée par des descendants de la femme du
chef d’orchestre Charles Munch, la ferme bénéficie aujourd’hui de vastes
espaces entièrement rénovés, dont la construction d’un auditorium
intimiste d’un peu plus de 300 places. L’excellente acoustique, signée
par Albert Yaying Xu, fait bien entendu la part belle au bois, offrant
autant une réverbération idéale qu’un aspect chaleureux.
Pour cette édition 2025, on retrouve dans ce cadre un duo de passionnés,
en la personne de Julia Campens et Stanley Smith, organisateurs du
festival Le Temps suspendu dans la région voisine du Centre-Val de
Loire. Fondateurs de l’ensemble The Smoky House, les musiciens essaient
de mieux faire connaître, depuis trois ans, le répertoire des airs
anglais, irlandais et écossais, patiemment recueillis au XIXe siècle
par de nombreux spécialistes, dont John Sutherland et Simon Fraser.
Lors de pauses bienvenues pendant le concert, Stanley Smith prend la
parole pour expliquer son projet, se félicitant notamment des
possibilités actuelles d’accès gratuit en ligne à de nombreuses
partitions inédites. On part ainsi en un vaste voyage à la découverte
d’un patrimoine méconnu, qui donne une grande part aux danses populaires
enjouées.
On imagine plusieurs fois en pensée ce que devaient être ces soirées de
groupe, où alternaient récits et légendes issus de la tradition orale
avec des moments de déhanchement endiablés sur la piste. Très bien
conçu, le programme joue la carte d’émotions tout aussi variables en
intensité, faisant notamment entendre un passage presque murmuré à la
viole solo ou certaines sonorités proches de la... cornemuse. On note
certes un déséquilibre entre l’esprit plus réservé et policé de Stanley
Smith, là où Julia Campens gratte davantage son violon, en une vitalité
nerveuse, aux accents bienvenus, parfaitement en phase avec ce
répertoire. Pour autant, certains aspects répétitifs de cette musique
agacent autant qu’ils fascinent, entre transe hypnotique et passages
volontiers plus nostalgiques. Le bis tout en douceur donne une
conclusion toute en évocation et en sensibilité, à même, manifestement,
de ravir le public, où l’on remarquait plusieurs anglophones.
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