La formation baroque
de l’Orchestre français des jeunes, dirigée par le bouillant
Reinhard Goebel, défend un programme tout entier tourné vers
les caractères de la danse au xviiie siècle. Une réussite autant humaine qu’artistique, saluée par un public enthousiaste.
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Reinhard Goebel |
L’Orchestre français des jeunes * est un « orchestre-école »
renouvelé chaque année suite à un vaste concours organisé à travers
toute la France, qui permet à une centaine de
personnes âgées de 16 à 25 ans d’être formées au métier de
musicien professionnel d’orchestre. Depuis 2006, un ensemble baroque
vient compléter cette mission en proposant une formation de
haut niveau sur instruments anciens, autour d’un répertoire
compris entre les xviie et xviiie siècles.
La préparation se conclut par une série de concerts dirigés par un
maestro de renommée internationale, tel le claveciniste français
Christophe Rousset ou le ténor écossais Paul Agnew dans le passé.
Comme l’année dernière, le chef d’orchestre allemand
Reinhard Goebel a été choisi pour encadrer les jeunes instrumentistes
en 2011. Artiste chevronné, il a acquis une réputation
d’excellence suite aux récompenses obtenues par ses nombreux
disques enregistrés à la tête du Musica Antiqua Köln, qui joue sur
instruments d’époque. Contrairement à son collègue
autrichien Nikolaus Harnoncourt, il est resté fidèle à un
répertoire qui va de Bach et Telemann à celui des écoles de Dresde et
Mannheim, en passant par Mozart.
Après Aix-en-Provence et avant Lausanne, l’écrin intime du
Théâtre des Bouffes-du-Nord accueille la vingtaine de jeunes gens
sélectionnés – aux deux tiers
féminins –, auxquels s’ajoutent trois professionnels chargés
d’assurer les premiers solos des rangs de hautbois, violons et
violoncelles. Goebel propose un programme autour des
compositeurs français Jean-Féry Rebel et André Campra, avant
d’aborder les figures plus connues de Georg Friedrich Haendel et
Johann Sebastian Bach en
deuxième partie.
Un programme tourné vers le début du xviiie siècle
Peu jouée en concert de nos jours, la musique de Jean-Féry Rebel
(1666-1747), élève de Lully, a déjà été défendu par Goebel au disque
avec l’enregistrement de son ballet
les Élémens en 1995. Le chef allemand choisit à nouveau de s’intéresser à ce répertoire en proposant des extraits des ballets les Caractères de la danse et
la Terpsicore, qui permettent d’apprécier toute la fougue
et la virtuosité propres à la musique de Rebel. C’est l’occasion pour
les instrumentistes de démontrer avec force brio
leur savoir-faire en la matière, aidés par le geste de Goebel,
volontiers rageur, qui demande une concentration de tous les instants.
Avec André Campra (1660-1744) et les extraits de son opéra-ballet les Fêtes vénitiennes, la musique se fait plus anguleuse. On regrette alors une absence de respiration dans
la direction de Goebel, la recherche de virtuosité tournant un peu à vide. On retrouve les mêmes défauts avec la Sonate en trio en sol majeur op. 5 nº 4
de
Georg Friedrich Haendel (1685-1759), qui permet cependant de
distinguer une belle cohésion des cordes de l’Orchestre français des
jeunes baroque.
En fin de concert, Reinhard Goebel démontre toutes ses qualités d’accompagnateurs dans la Première suite en do majeur
de Johann Sebastian Bach (1685-1750). Les
deux hautbois et le basson sont parfaitement mis en valeur par une
direction attentive et précise, toujours aussi vive, mais respectueuse
de la polyphonie du Cantor de Leipzig.
Les jeunes instrumentistes obtiennent ainsi une ovation
parfaitement méritée, fruit d’un engagement certain, mais également d’un
visible plaisir à jouer ensemble. Aussi leur pardonnera-t-on
d’avoir omis de faire applaudir leur chef d’orchestre, sans doute
émus après cette soirée parfaitement maîtrisée.
* L’autre concert parisien de l’Orchestre français des jeunes, sur instruments modernes, aura lieu à la Salle Pleyel le 19 décembre prochain. Le chef américain Dennis Russell Davies tiendra la baguette.
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