dimanche 20 décembre 2015

Concert de l'Orchestre du Gewandhaus - Herbert Blomstedt - Gewandhaus à Leipzig - 17/12/2015

Herbert Blomstedt
C’est seulement quelques jours après avoir assisté à un concert de l’Orchestre du Gewandhaus, à Leipzig même, que nous apprenions la triste nouvelle du décès de Kurt Masur. En faisant trôner son buste auprès de ses illustres prédécesseurs, Mendelssohn en tête, Leipzig n’avait d’ailleurs pas eu besoin d’attendre les derniers jours du grand chef pour rendre hommage à celui qui la marqua tant de son empreinte, y faisant ses études musicales avant d’accéder au poste de directeur musical du prestigieux orchestre de la ville (1970-1996). C’est avec une intégrale Beethoven fort remarquée pour l’allant de ses tempi, l’absence de pathos et la légèreté de la pâte orchestrale que Masur avait su se faire connaitre bien au-delà du rideau de fer, avant les consécrations new-yorkaises ou parisiennes.


C’est donc en terrain bien balisé à Leipzig qu’un autre vétéran de quatre-vingt-huit printemps, le chef suédois naturalisé américain Herbert Blomstedt, venait lui aussi porter haut la musique du natif de Bonn avec sa Deuxième Symphonie (1801-1802). Visiblement très apprécié dans la grande ville de Saxe, où il rejouera Beethoven en mai 2016 (la Pastorale, accompagnée du rare Concerto pour piano de Reger), Blomstedt, successeur de Masur entre 1998 et 2005, reçoit une ovation avant même le début du concert. Dans l’excellente acoustique de la salle moderne du Gewandhaus, reconstruite en 1981, la lecture du vieux sage étonne d’emblée par ses tempi vifs, et ce alors même que de nombreux chefs ralentissent leur battue avec l’âge. Toujours d’une grande lisibilité et sans vibrato, son geste accélère les passages rapides pour mieux ralentir dans les parties apaisées. Sans cesse, ce jeu sur les contrastes sera mis en avant, avec des accélérations sans aucun pathos, presque brutales, en opposition aux ralentissements doucereux. Si les premiers violons apparaissent au premier plan en maintes occasions, les cordes graves se font plus discrètes, tandis que le chef refuse toute respiration, expédiant les silences pour imposer son rythme.


Blomstedt poursuit dans la même optique avec la Deuxième Symphonie de Sibelius (1902), volontiers prosaïque en son début et évitant toute effusion ou lyrisme. Aucune description d’un quelconque panorama nordique ici, tant le geste se fait redoutable de sévérité, orageux et avec des tutti lancés à pleins feux, à l’aide de cuivres volontairement éclatants. Toujours vissé à son crédo d’un contraste piano/forte, Blomstedt en oublie quelque peu le medium et ne s’intéresse guère à l’architecture et à la progression des crescendos. Cette lecture inégale, souvent éclairante par son côté iconoclaste, impressionne néanmoins par sa radicalité en noir et blanc, parfaitement tenue de bout en bout. La dernière partie du finale fait notablement ressortir le trombone, avant que l’ultime choral de cuivres ne soit volontairement (et inhabituellement) couvert par des cordes et des timbales déchaînés, imposant un chaos impressionnant. De quoi justifier une ovation debout finale très émouvante pour ce chef qui garde toujours bon pied bon œil.

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