samedi 18 mai 2024

« L’Olimpiade » de Domenico Cimarosa - Christophe Rousset - Opéra de Versailles - 16/05/2024

Christophe Rousset

Il aurait été impensable qu’un communicant de la trempe de Laurent Brunner, directeur de l’Opéra de Versailles depuis sa réouverture en 2007, ne célèbre comme il se doit l’organisation des jeux Olympiques en France – et ce d’autant plus que plusieurs manifestations sont prévues dans le parc du château, des sports équestres au pentathlon moderne. Le choix de L’Olimpiade, sur un livret de Métastase, s’est donc vite imposé comme incontournable dans ce contexte : mais quelle adaptation préférer, parmi les quelque soixante composées entre 1733 et 1817 ? Si le Théâtre des Champs‑Elysées s’est tourné vers Vivaldi pour l’une des dernières productions scéniques de sa saison, l’Opéra de Versailles s’est intéressé à la version plus méconnue de Domenico Cimarosa (1749‑1801). Composé en 1784, cet opera seria fait découvrir un visage différent du Napolitain, plus connu pour ses chefs‑d’œuvre comiques, tels que Le Mariage secret ou L’Italienne à Londres (voir la production créée à Francfort en 2021 et reprise en ce printemps).

Château de Versailles Spectacles a aussi eu la bonne idée de faire enregistrer au préalable, avec les mêmes interprètes que le présent concert, un coffret de deux disques sorti simultanément, permettant ainsi de faire découvrir au plus grand nombre ce petit bijou dans les meilleures conditions possibles, compte tenu de l’excellence des talents réunis : la production vénitienne d’Andrea Marcon, célébrant le bicentenaire de la mort de Cimarosa en 2001, n’avait malheureusement pas eu cette chance. Quoi qu’il en soit, ce retour attendu permet de se régaler de la virtuosité et de l’imagination mélodique quasi inépuisables de Cimarosa, qui offre à ses rôles principaux (Clistene, Aristea et Megacle) des parties d’une difficulté vocale haute en couleur, particulièrement pour les vocalises féminines. Le livret adapté en 1784 recentre en effet l’histoire sur les tribulations amoureuses des personnages principaux, comme l’explique la passionnante notice du musicologue Alessandro Di Profio, rédigée pour l’album. De quoi permettre une simplification des enjeux, tout en réduisant drastiquement la place des récitatifs, assez brefs et plus ornés (notamment par les vents).

Dirigeant du pianoforte, Christophe Rousset anime la partition de ses tempi vifs et admirablement articulés dans les verticalités, d’une belle urgence rythmique, faisant valoir davantage de respiration dans les parties apaisées. Comme à son habitude, il réunit autour de lui un plateau vocal de toute beauté, mené par la prima donna Rocío Pérez (Aristea), aux vocalises et aux aigus rayonnants de facilité. La soprano espagnole possède un tempérament dramatique éloquent qui la place à l’égal de sa compatriote Maite Beaumont (Megacle), dont on connaît les éminentes qualités en ce domaine. Beaumont nous régale de ses phrasés d’une rare intelligence, à l’instar de la vénéneuse Marie Lys (Argene), aux intentions mordantes. On aime aussi la Licida de Mathilde Ortscheidt, dont les graves chaleureux et pulpeux font oublier une émission plus rétrécie dans l’aigu. La petite voix d’Alex Banfield (Aminta) manque certes de puissance, mais déploie des trésors de raffinement, tandis que Josh Lovell (Clistene) donne davantage de pur plaisir vocal, du fait de sa projection insolente et de son articulation claire. La beauté du timbre et l’aisance technique ne font pas oublier une interprétation un rien extérieure par endroits, seul domaine où le ténor canadien a encore une marge de progression.

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