samedi 31 octobre 2015

Concert de l'Orchestre national de France - Nikolaj Znaider et Edgar Moreau - Auditorium de la Maison de la Radio - 29/10/2015

Nikolaj Znaider
Il faudra s’y habituer: parallèlement à sa carrière bien connue de virtuose du violon, le Dano-israélien Nikolaj Znaider poursuit une carrière de chef d’orchestre depuis plusieurs années. Dès 2009, il est ainsi principal chef invité de l’Orchestre de chambre de Suède, puis de l’Orchestre du Mariinsky l’année suivante. A Paris, le Philharmonique de Radio France lui a déjà permis de faire ses débuts voilà trois ans dans un programme consacré à Tchaïkovski et Dvorák.


Place cette fois à l’Orchestre national de France autour d’un répertoire sensiblement identique, Saint-Saëns remplaçant Tchaïkovski, tandis que l’on entend l’une des symphonies les plus réussies de Dvorák, sa Sixième (1880). Rien de romantique, pourtant, dans la vision de Znaider, qui cravache comme jamais un orchestre très attentif. Particulièrement dégraissées, les textures se détachent en un étagement sonore faisant apparaître les tics d’écriture de Dvorák – la primauté des premiers violons en étant la marque la plus éclatante. Znaider ne tombe pas pour autant dans une lecture analytique, imprimant à ses troupes un tempo vif dans les passages verticaux – aux attaques sèches, presque brutales – tandis qu’il se fait plus mesuré dans les passages lyriques, sans legato. Ce geste convient bien à une telle œuvre, débarrassée de toute scorie dégoulinante, mais peut fatiguer à la longue par sa rythmique au volume sonore conséquent, volontiers premier degré. On aimerait ainsi, ici et là, davantage de respiration et de subtilité dans les climats.


La première partie du concert avait donné le ton avec une version cinglante de la Deuxième Suite du Tricorne de Falla. Sous la baguette électrique de Znaider, cette œuvre composée en 1917 se donne des allures modernistes, annonçant étonnamment la rythmique grisante du Honegger de Pacific 231 (1923) et du Prokofiev de la Deuxième Symphonie (1924). Cette lecture de caractère, qui accentue chaque phrasé, exalte une certaine sauvagerie au III et relègue la mélodie au second plan – à l’instar du travail réalisé dans la Sixième de Dvorák.


La concentration du public, plus familial qu’à l’habitude, se fait plus grande encore avec l’arrivée du violoncelliste français Edgar Moreau, 21 ans. Dès lors qu’il fait résonner son instrument, le visage serein du jeune prodige s’anime d’une expressivité captivante, en parfaite harmonie avec ses prises de risque nombreuses. L’imperturbable aisance de son jeu, aussi déterminé que fougueux, semble ne jamais pouvoir être prise en défaut au niveau technique, et ce d’autant plus que la complicité avec le chef semble réelle. On aimerait d’ailleurs, à l’issue de ce Concerto aux trois mouvements enchaînés en un élan mozartien, les entendre tous deux dans le Double Concerto de Brahms. Plus classiquement, Moreau revient sous les applaudissements du public avec la Gigue de la Troisième Suite de Bach, entonnée à un tempo très vif, sans respiration. Un rien expédié, ce bis n’en fait pas oublier pour autant la force de caractère irrésistible émanant de ce petit lutin décidément bien surprenant.

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