Dans un contexte budgétaire serré, le Festival d’Ambronay a été
contraint de faire des choix inédits, en supprimant un week‑end pour
cette édition : cette initiative permet de préserver le niveau de
qualité attendu pour l’ensemble des concerts maintenus, ce qui est à
saluer. On peut à la fois en juger par la liste des artistes programmés,
de Raphaël Pichon à Leonardo García Alarcón, en passant par Camille
Delaforge, mais également par l’ambition intacte des programmes
proposés, à l’image des concerts Scarlatti en début de festival.
La musique de Jean‑Sébastien Bach est également à l’honneur cette
année, avec deux concerts très attendus : des cantates de jeunesse, le
19 septembre prochain avec l’ensemble Les Correspondances de Sébastien
Daucé, succéderont ainsi au présent concert, consacré à l’iconique Messe en si (1749) de Bach.
On retrouve pour l’occasion les forces réunies du chœur Vox Luminis,
fondé en 2004 par Lionel Meunier, aux côtés de l’Orchestre baroque de
Fribourg, dont la réputation n’est plus à faire depuis ses succès
internationaux avec Thomas Hengelbrock puis René Jacobs, notamment. Pour
ce concert, la direction est partagée entre le premier violon Péter
Barczi, officiant de son poste pour l’orchestre, en lien avec Lionel
Meunier, placé au centre du chœur. S’il était fréquent au XVIIIe siècle
qu’un ou plusieurs interprètes assurent la direction musicale sans que
cette fonction soit isolée, cette spécificité apporte pour ce début de
concert plusieurs imprécisions audibles, surtout pour les cordes, un
rien flottantes par endroits. De même, il faut nécessairement renoncer à
ses habitudes d’écoute pour accepter le parti pris de recourir à des
solistes issus du chœur, tant la virtuosité attendue fait défaut : c’est
là un choix effectué par de nombreux autres formations baroques (Bach Collegium Japan ou Collegium Vocale de Gand, par exemple), qui se fondent là aussi sur une tradition perdue au XIXe siècle, lorsque la musique de Bach a été redécouverte.
On gagne dès lors en homogénéité et en simplicité d’élocution ce que
l’on perd en théâtralité, même si chaque soliste vient alternativement
se présenter face au public, sur un podium en milieu de scène. A ce
jeu‑là, certaines individualités se détachent davantage, à l’instar des
deux interprètes chargés de la partie d’alto, Victoria Cassano, puis
William Shelton, en fin de soirée, lors d’un émouvant et sobre « Agnus
Dei ». Auparavant, on aura apprécié en premier lieu le superbe chœur Vox
Luminis, dont chaque intervention illumine la soirée. Mise en place
superlative, équilibre entre les pupitres et écoute mutuelle fondent les
qualités de cet ensemble judicieusement mis en avant par l’Orchestre
baroque de Fribourg. En dehors des cordes, trop timides dans les
passages dramatiques, l’orchestre vaut quant à lui par sa variété de
couleurs, tout autant que sa perfection technique (trompettes et premier
hautbois, surtout). Une soirée émouvante par sa classe interprétative
sans ostentation, à la hauteur du chef‑d’œuvre éternel de Bach.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire