Pour sa cinquante-septième édition, le Festival de La Chaise‑Dieu
accueille pour la première fois l’Orchestre de l’Opéra de Lyon, à même
de mettre en valeur les forces telluriques déployées par Wagner en
seconde partie de concert. Avant l’entracte, la formation met un peu de
temps à se chauffer dans le Second Concerto (1845) de
Mendelssohn, peu aidée par un démarrage cafouilleux, entre décalage avec
la soliste et sonorités trop doucereuses. On s’habitue peu à peu à la
vision toute en mesure de Rustioni, qui fouille les détails de la
partition en allégeant les textures. Ce tapis de velours offert à
Francesca Dego, sa compagne à la ville, manque certes d’aspérités, mais
permet au violon élégant de s’épanouir dans une lecture hédoniste, aux
superbes sonorités. Les tenants d’un violon plus nerveux et bondissants
en seront ici pour leur frais, Dego manquant manifestement d’épaisseur
et de volume dans les tutti, ce qui est préjudiciable au dernier
mouvement, plus virtuose.
Après l’entracte, on découvre l’étonnante « symphonie » appelée « Ring sans paroles », réalisée en 1987 par le chef d’orchestre Lorin Maazel, d’après les quatre opéras qui composent L’Anneau du Nibelung
(1854‑1876) de Wagner. Sans ajouter une seule note de sa main, Maazel
reprend certains passages tels quels, comme les premières notes
fascinantes du Prélude de L’Or du Rhin, où la musique hypnotique
et répétitive émerge peu à peu d’un magma en suspension, ou encore
certains extraits bien connus des préludes, mais surprend plus encore
par l’entremêlement des motifs issus des différents opéras, en un
maelström sonore le plus souvent confié aux cuivres. Les rares moments
d’apaisement confiés à la délicatesse des bois (évoquant les atmosphères
bucoliques de la forêt) ou encore la mise en avant en solo du pupitre
de violoncelles, sont rapidement balayés par le tempérament volcanique
de Wagner, souvent mis en avant ici. Si l’acoustique de l’Abbatiale
Saint‑Robert paraît parfois un rien trop compacte, Daniele Rustioni
déjoue tous les pièges par son attention à la respiration et aux
équilibres, évitant tout clinquant : son affinité avec ce répertoire
prend toute sa mesure, comme nous l’avions déjà constaté récemment à Lyon, dans Tannhäuser. Jouées d’un seul tenant, à l’instar des derniers ouvrages lyriques de Wagner, les soixante‑dix minutes de ce « Ring sans paroles » ne manquent pas d’impressionner par leur emphase spectaculaire, digne du maître de Bayreuth.
Parce que la culture se conjugue sous plusieurs formes, il sera sujet ici de cinéma, de littérature, de musique, de spectacles vivants, selon l'inconstante fantaisie de son auteur
samedi 26 août 2023
Concert de l'Orchestre de l’Opéra de Lyon - Daniele Rustioni - Festival de la Chaise-Dieu - 24/08/2023
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