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| Christian Măcelaru | 
C’est à un passionnant programme de musique française que nous convie le
 Festival de Montpellier pour le dernier concert consacré au centenaire 
de la mort de Saint-Saëns: on pourra être surpris d’y trouver en 
ouverture les Feux d’artifice (1998, révisés en 2003) de 
Guillaume Connesson (né en 1970), mais il est vrai que cette pièce 
tonale délicieuse de verve permet de chauffer l’orchestre au mieux, tout
 en faisant valoir l’irrésistible talent d’orchestrateur du compositeur.
 Le public ne s’y trompe pas en réservant un accueil chaleureux à la 
direction spontanée et directe de Cristian Măcelaru, le tout nouveau 
directeur musical de l’Orchestre national de France. Son premier concert
 «officiel» avec la formation, en septembre dernier, avait déjà révélé son intérêt pour la musique de Saint-Saëns, dont il doit enregistrer l’intégrale des cinq Symphonies d’ici la fin de l’année. Ce sera ainsi l’occasion d’approfondir la connaissance de ce corpus en grande partie méconnu.
Place cette fois à la rare Symphonie «Urbs Roma» (1857), qui 
s’intercale chronologiquement entre les deux premières symphonies 
numérotées, mais qui n’a pas eu cet honneur, à l’instar de la Symphonie en la majeur
 (1850). On découvre là un Saint-Saëns très inégal dans les mouvements 
extérieurs, où la double influence de Beethoven et Mendelssohn (sans la 
beauté lumineuse des interventions des vents) est audible, avec une 
propension à privilégier les cordes et les cuivres à l’unisson. Les 
effets de manche aux timbales et les ruptures abruptes surprennent 
souvent, même si l’élan juvénile peut séduire par endroit. Le deuxième 
mouvement (Molto vivace) apparaît autrement plus intéressant, 
tant le compositeur montre un visage audacieux dans les enchevêtrements 
virtuoses, le tout bien soutenu par les attaques franches de 
l’orchestre. Ce mouvement jubilatoire invite certains spectateurs à 
applaudir avant l’heure, bien vite rappelés à l’ordre par leurs voisins 
scrupuleux. De même, le début mystérieux du mouvement lent, aux raideurs
 assumées par Măcelaru, fait entendre un Saint-Saëns plus sombre et 
moins corseté qu’à l’habitude, visiblement inspiré par cette marche 
funèbre entêtante. Le compositeur suspend brièvement la tension par 
endroit, avec des parties plus éthérées aux bois, notamment lors du 
second thème énoncé par la clarinette. Un répit de courte durée, tant le
 compositeur tient son auditoire en un climat étouffant: on pense 
parfois aux premières symphonies de Dvorák, plus libres et plus 
personnelles de ton, mais incontestablement moins efficaces que les 
dernières.
Plus tôt dans la soirée, Măcelaru nous a régalé de son tempérament 
fougueux avec deux chefs d’œuvre de César Franck, le poème symphonique Les Djinns (1885) et les Variations symphoniques
 (1885). En enchaînant les deux œuvres d’un seul tenant, le chef roumain
 emporte ses troupes dans un élan souvent compact dans les tutti, mais 
davantage fouillé dans les parties apaisées. Cette verve s’accorde bien 
avec le piano techniquement sans faille de Bertrand Chamayou, mais un 
rien trop métronomique par endroit. On a là davantage une symphonie avec
 piano obligé qu’un concerto à proprement parler, ce qui n’est en rien 
un contresens ici. En bis, le pianiste français revient à Saint-Saëns, 
avec «Les Cloches de Las Palmas», quatrième des six Etudes de l’Opus 111, au caractère espiègle, bien défendue par son toucher agile. 

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