jeudi 27 avril 2023

« Vingt et une compositrices françaises » - Disque Palazzetto Bru Zane

 

C’est peu dire que le Palazzetto Bru Zane (PBZ) crée l’évènement en ce début d’année en consacrant un coffret de plus dix heures de musique entièrement dédié aux compositrices du « grand XIXe siècle », de Louise Farrenc à Nadia Boulanger – le PBZ ayant l’habitude de déborder, ce dont on ne se plaint pas, de la stricte promotion du répertoire de l’ère romantique. Pas moins de vingt et une compositrices à découvrir ou redécouvrir pour accompagner Marie Jaëll (1846‑1925), qui avait déjà eu l’honneur en 2016 d’un portrait entièrement dédié à sa musique. Le legs de l’Alsacienne est à nouveau sollicité autour de nouveaux enregistrements, puisant autant dans ses mélodies, sa musique de chambre ou symphonique – cette dernière rappelant les fulgurances franckistes en un sens mélodique affirmé, autant qu’une maîtrise éloquente de la forme. La splendide Symphonie en ut dièse mineur de Charlotte Sohy (1887‑1955) puise aux mêmes sources, mais fascine plus encore par la gravité de son inspiration, aux effluves mystérieux et chatoyants. De quoi nous éloigner de l’image d’Epinal de compositrices plus à l’aise dans les seules petites formes.

Ce serait évidemment méconnaître le tempérament volcanique d’Augusta Holmès (1847‑1903), qui n’a pas à rougir de son admiration pour Wagner, modèle assumé de ses élégiaques Contes divins et de son plus inégal Andromède. Un autre grand nom se dégage, bien connu depuis plusieurs années déjà, avec la figure de Mel Bonis (1858‑1937), dont la palette debussyste impressionne à force de raffinement et d’esprit, et ce dans tous les domaines. On ne présente plus Louise Farrenc (1804‑1875), dont l’élan beethovenien bénéficie de la grâce aérienne de David Reiland, chef le plus inspiré du coffret, avec Leo Hussain. Si la musique de Lili Boulanger (1893‑1918) s’installe à juste titre au répertoire de la plupart des grands orchestres, dans le monde entier, celle de sa sœur Nadia reste à mieux connaître, notamment la majestueuse cantate La Sirène (1908).

Le coffret peut dérouter dans un premier temps par son refus assumé de classer les différents morceaux entre eux, mélangeant les époques et les styles de musique : on se fait peu à peu à ce parti pris qui brise les repères pour inviter au lâcher prise, permettant de quitter alternativement le brio symphonique pour embrasser l’art délicat de la mélodie, souvent interprété par un Cyrille Dubois toujours idéal dans ce répertoire, tandis que les œuvres de musique de chambre ravissent tout autant par leur diversité et leur inventivité. Outre la qualité superlative des prises de son, on se réjouit de retrouver la fine fleur des meilleurs interprètes du moment, qui ne sacrifie jamais le style à la ferveur. Assurément un grand Must à chérir pour longtemps !

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