Ancienne capitale de Moravie aujourd’hui détrônée par sa voisine Brno,
la ville d’Olomouc conserve de nombreux atouts, au premier rang desquels
son patrimoine religieux important, de même que la vitalité de ses
nombreuses universités. Avec le Théâtre morave d’Olomouc, la vie
culturelle locale peut aussi s’enorgueillir de l’une des institutions
parmi les plus renommées du pays, qui dispose de pas moins de trois
troupes permanentes d’artistes (comédiens, chanteurs et danseurs), ainsi
que de son propre orchestre.
De quoi expliquer l’excellent niveau de la production d’Ivan le terrible
(1944) de Prokofiev, immédiatement perceptible dès le lever de rideau.
Créé en 2002 à Brno, puis repris en 2008 à Bratislava, par l’ancien
danseur de premier plan Libor Vaculík, ce spectacle trouve son origine
dans l’adaptation réalisée par l’incontournable chorégraphe russe Yuri
Grigorovich (directeur artistique du Bolchoï de 1964 à 1995), d’après la
musique du film composée pour Eisenstein. Un nouvel assemblage des
extraits musicaux, ainsi qu’un livret recentré sur les personnages
principaux (Ivan IV, son épouse Anastasie et leurs rivaux), ont permis
la recréation de ce spectacle haut en couleur, à l’élan classique
(pointes, envolées et nombreux portés) modernisé par une intense
fluidité des mouvements et toujours en lien avec les moindres inflexions
musicales. Au plus près des intentions narratives, la direction
d’acteur constitue la grande force du spectacle, interprétée avec
engagement par le moindre second rôle (pour une vingtaine de danseurs au
total). Seule la seconde partie, après l’entracte, déçoit quelque peu
par l’emploi redondant des mêmes extraits musicaux (préalablement
enregistrés et diffusés via une sonorisation trop uniforme), aux
transitions répétitives aux percussions (surtout les cloches), tandis
que l’alternance entre les morceaux donne parfois l’impression d’un
collage un peu artificiel.
Malgré ces quelques faiblesses, le spectacle se montre réjouissant, tout
d’abord par la qualité de la musique de Prokofiev, grand maître des
variations d’atmosphère et toujours aussi impressionnant par sa capacité
à convoquer toutes les ressources de l’orchestre, d’une richesse de
coloris tour à tour emphatique et délicatement émouvante. On aime aussi
l’emploi des matériaux populaires ou des rudesses dans les graves,
rappelant l’influence de Moussorgski. Au niveau visuel, outre la qualité
des éclairages très variés, le spectacle bénéficie d’une scénographie
évoquant subtilement la Russie ancienne par quelques éléments
symboliques, jamais ostentatoires. Mais c’est surtout la qualité de la
troupe de danseurs réunis qui impressionne tout du long, entre le brio
athlétique et dramatique du Français Aurélien Jeandot (Ivan), ou encore
la délicatesse d’interprétation des deux rôles féminins principaux. De
quoi inciter à fréquenter les théâtres tchèques bien au‑delà de ceux,
déjà très renommés, de Prague.
Parce que la culture se conjugue sous plusieurs formes, il sera sujet ici de cinéma, de littérature, de musique, de spectacles vivants, selon l'inconstante fantaisie de son auteur
samedi 28 octobre 2023
« Ivan le terrible » de Serge Prokofiev - Opéra d'Olomouc - 24/10/2023
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