Depuis sa prise de fonction en tant que directeur de l’Opéra de Lyon en
2003, Serge Dorny affiche ses préférences pour un répertoire enrichi de
toute sa diversité, qui lui ont fait présenter toute une série
d’ouvrages jamais entendu dans la capitale des Gaules – tout
particulièrement des chefs d’œuvre de la première moitié du XXe siècle.
Revers de la médaille de cette passionnante curiosité, les piliers du
répertoire sont mis de côté, à l’instar des grands Verdi, Puccini ou
Richard Strauss. Seul Mozart échappe à cette programmation dans la
lignée de celle de son compatriote Gerard Mortier (dont il a été le
dramaturge à la Monnaie dans les années 1980): on ne s’étonnera guère,
dans ces conditions, de n’avoir entendu qu’un seul ouvrage de Rossini
depuis 2003, le rare Comte Ory en 2014. C’est donc là un événement que de retrouver pour cette fin d’année La Cenerentola (Cendrillon), tout dernier opéra-bouffe composé par Rossini pour le public italien en 1817.
Avant de découvrir ce spectacle, les novices devront savoir que l’adaptation faite pour Rossini évacue les rôles du père et de la belle-mère de Cendrillon, tout autant que les souliers de verre (devenus bracelets) et la fée. Dès lors, c’est le beau-père Don Magnifico qui endosse le rôle du tortionnaire, tandis que les atours pour le bal sont donnés par Alidoro, tuteur du Prince. On soulignera aussi le rôle important du valet Dandini qui joue le faux Prince pendant la quasi-totalité de l’action, offrant un jeu de masques souvent désopilant, à l’instar du ridicule Don Magnifico. A cet égard, l’adaptation récente de Joël Pommerat s’avère finalement plus proche du conte de Perrault. Quoi qu’il en soit, autour d’une musique irrésistible, le livret de Rossini joue la carte du comique avec bonheur, sans trop s’attarder sur les états d’âme de l’héroïne. C’est sans doute pour cette raison que nombre de metteurs en scène souhaitent donner davantage de profondeur à cette histoire – on pense tout particulièrement à Sandrine Anglade, très inspirée dans sa vision poétique donnée à l’Opéra écossais en 2014.
Avant de découvrir ce spectacle, les novices devront savoir que l’adaptation faite pour Rossini évacue les rôles du père et de la belle-mère de Cendrillon, tout autant que les souliers de verre (devenus bracelets) et la fée. Dès lors, c’est le beau-père Don Magnifico qui endosse le rôle du tortionnaire, tandis que les atours pour le bal sont donnés par Alidoro, tuteur du Prince. On soulignera aussi le rôle important du valet Dandini qui joue le faux Prince pendant la quasi-totalité de l’action, offrant un jeu de masques souvent désopilant, à l’instar du ridicule Don Magnifico. A cet égard, l’adaptation récente de Joël Pommerat s’avère finalement plus proche du conte de Perrault. Quoi qu’il en soit, autour d’une musique irrésistible, le livret de Rossini joue la carte du comique avec bonheur, sans trop s’attarder sur les états d’âme de l’héroïne. C’est sans doute pour cette raison que nombre de metteurs en scène souhaitent donner davantage de profondeur à cette histoire – on pense tout particulièrement à Sandrine Anglade, très inspirée dans sa vision poétique donnée à l’Opéra écossais en 2014.
Adoré ou détesté, le controversé Stefan Herheim choisit quant à lui de revisiter le livret dans ses moindres détails, conformément à son habitude. On se souvient que sa géniale transposition d’une Rusalka victime d’un serial killer n’avait pas fait l’unanimité, ici même à Lyon fin 2014: il est vrai que le travail du metteur en scène norvégien demande au public autant une ouverture d’esprit qu’une parfaite concentration pour bien saisir l’ensemble des allusions distillées tout au long de l’action. Ainsi dès l’Ouverture de La Cenerentola, où un homme grimé en Rossini sort d’une cheminée aux faux airs d’antre des enfers: avec sa plume magique, il va faire revivre à une Cendrillon contemporaine, habillée en femme de ménage, l’ensemble des péripéties de l’action sous forme de cauchemar. Cette idée permet à Herheim de composer des tableaux volontairement kitsch, que ce soient les trouvailles visuelles de la vidéo utilisée en arrière-scène ou les costumes délirants des interprètes, en strass et paillettes.
Cette mise en scène survitaminée démontre aussi toute la palette des possibilités d’une direction d’acteur inventive, même si certains pourront reprocher à Herheim d’en faire trop, notamment dans les scènes intimistes. Il n’en reste pas moins que tout se tient de bout en bout, permettant de proposer l’un des spectacles les plus réjouissants vus cette année. On ne dévoilera pas ici les multiples idées brillantes du metteur en scène, plus abordables en comparaison de l’audacieuse transposition de Rusalka: mais il faut découvrir ou redécouvrir le travail de l’un des plus importants metteurs en scène de sa génération. A cet égard, on ne manquera pas l’an prochain la reprise au cinéma de l’une de ses productions les plus fameuses, La Dame de pique de Tchaïkovski, donnée à Amsterdam avec Mariss Jansons à la baguette en 2016.
Une telle réussite scénique ne serait évidemment qu’imparfaite sans un plateau vocal à la hauteur: comme souvent ici, celui-ci n’appelle que des éloges. Ainsi du superbe Dandini de Nikolay Borchev, très à l’aise scéniquement et vocalement, tandis que Cyrille Dubois (Don Ramiro) fait valoir son beau timbre parfaitement articulé. On se réjouira aussi du tour de force comique imprimé par Renato Girolami en Don Magnifico de luxe, tandis que Michèle Losier (Cendrillon) sait alterner fragilité et sensibilité avec une voix parfaitement stable et projetée. On mentionnera encore l’excellence des chœurs, tandis que Stefano Montanari se régale dans la fosse des crescendos de Rossini, parfaitement étagés, en un rythme qui soutient toujours ses chanteurs. Assurément une grande soirée dans la belle maison lyonnaise, vivement applaudie en fin de représentation par un public conquis.
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