Parallèlement aux représentations de La Juive de Fromental Halévy (1799-1862), qui se poursuivent jusqu’au 28 septembre prochain, l’Opéra de Genève a eu la judicieuse idée de nous faire découvrir l’opéra-comique L’Eclair (1835), créé par Halévy dans la foulée du succès rencontré par La Juive. C’est là l’occasion de confronter le chef d’œuvre bien connu du Français avec un ouvrage on ne peut plus différent (aux dialogues ici raccourcis), mais tout aussi inspiré : loin des grandeurs tragiques du grand opéra (voir aussi La Reine de Chypre, exhumée par le Palazzetto Bru Zane en 2017), Halévy fait preuve d’une légèreté sautillante et raffinée dès l’ouverture, avec de nombreuses ruptures de ton malicieuses.
D’abord destiné à Adolphe Adam, qui abandonne le projet après l’écriture
du premier acte, l’ouvrage est repris en totalité par un Halévy très en
verve, qui se régale des courtes saynètes entre les quatre personnages,
entrecroisées de mélodies tout aussi brèves, en une recherche de
sonorités en lien avec les effets comiques du livret. Bien que très vite
redondant, le livret touche au but en moquant la superficialité
bourgeoise qui pense davantage à son intérêt matériel et aux apparences,
au détriment de l’expression des sentiments. Si les femmes semblent en
prendre seules pour leur grade dès le premier duo misogyne : « Pas de toilette, pas d’amour »,
les librettistes n’épargnent pas non plus le personnage de George, pour
qui toute épouse en vaut une autre, en bon philosophe pragmatique ayant
fait ses études à Oxford.
Très réussi, le premier acte se déroule sans temps mort, entre piquantes roucoulades et ravissant air du sommeil pour Lionel, avant le fameux éclair en contraste, lors d’une tempête aux effets sonores spectaculaires. Si les deux actes suivants se coulent davantage dans le moule attendu de la farce boulevardière, le raffinement de l’accompagnement orchestral donne toujours une hauteur de vue au propos. Il faut dire que la direction toujours précise et élégante de Guillaume Tourniaire, spécialiste de l’ancien élève d’Halévy, Saint-Saëns (voir notamment Hélène en 2008 et Ascanio en 2017, déjà à Genève) est un régal tout du long, à juste titre applaudi chaleureusement en fin de représentation. L’assistance est malheureusement un peu maigre pour l’occasion, ce que déplore le directeur Aviel Cahn en début de représentation, tout en annonçant que le rôle de Lionel est exceptionnellement incarné à deux voix, avec d’une part le chant pour Edgardo Rocha et de l’autre les dialogues parlés pour le comédien Leonardo Rafael.
On retrouvera toute cette fine équipe au disque, Aviel Cahn ayant annoncé son enregistrement dans la foulée de cette représentation. A suivre.
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