Il est passionnant de pouvoir écouter successivement deux chefs‑d’œuvre
de Verdi écrits à presque trente ans d’intervalle, et ce d’autant plus
que le même chef, Daniel Oren, officie dans la fosse : entre Nabucco (1842), entendu la veille et Aïda
(1871), le style de Verdi a évolué pour embrasser des lignes plus
sinueuses, tout autant qu’une orchestration plus allégée et reposant
davantage sur les vents, au détriment des cordes. L’acoustique n’est
sans doute pas idéale pour ce type d’ouvrage plus raffiné, mais Daniel
Oren sait faire ressortir des détails d’orchestration malgré ce
handicap, gardant le cap de sa direction finement ciselée, avec beaucoup
d’esprit et d’à‑propos dramatique.
Le plateau vocal réuni, sans briller, se montre de bonne tenue. Les deux
interprètes féminines remportent une belle ovation au moment des
saluts. Il faut dire que Monica Conesa donne à son Aïda des accents
tragiques déchirants, faisant oublier un faible volume par des graves
aussi ensoleillés que corsés. Les aigus très précis laissent entrevoir
un léger vibrato, auquel on s’habitue sur la durée. La technique est
plus solide concernant Olesya Petrova (Amneris), qui se montre quelque
peu en retrait au début avant de se déchaîner ensuite à force d’aisance
et de velouté dans les phrasés radieux. On est plus déçu en revanche par
le Radamès de Riccardo Massi (remplaçant de dernière minute de Fabio
Sartori), au timbre ingrat dans l’aigu du fait d’une émission trop
nouée. Tous les seconds rôles assurent l’essentiel, de même que les
chœurs, qui connaissent manifestement ce répertoire sur le bout des
doigts.
Comme l’avant‑veille,
la mise en scène de Franco Zeffirelli opte pour une répartition des
différents choristes par blocs afin d’obtenir de saisissants effets de
spatialisation. De même, on retrouve son goût pour un étagement de
l’action par « caste », avec une immense pyramide dorée magnifiquement
revisitées par les éclairages. Zeffirelli n’a pas son pareil pour animer
les scènes d’ensemble, notamment le ballet endiablé en hommage au
souverain et sa fille Amnéris, avant la célébrissime marche des
trompettes. On retrouve sa maestria à l’œuvre avec force figurants et
danseurs, où le faste des costumes et accessoires atteint son apogée,
donnant parfois l’impression d’une luxueuse revue de cabaret – Line
Renaud en moins.
Parce que la culture se conjugue sous plusieurs formes, il sera sujet ici de cinéma, de littérature, de musique, de spectacles vivants, selon l'inconstante fantaisie de son auteur
lundi 12 septembre 2022
« Aïda » de Giuseppe Verdi - Festival de Vérone - 04/09/2022
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