Le concert prend place dans la salle provisoire appelée
Isarphilharmonie, où l’Orchestre philharmonique de Munich est en
résidence depuis son ouverture en 2021, et ce jusqu’en 2027, date de la
réouverture du centre culturel de Gasteig (actuellement en rénovation).
La salle entièrement moderne, de 1 900 places, est attenante à une
ancienne usine, qui héberge une bibliothèque municipale, autant qu’elle
sert de foyer pour les concerts. Un buste de Sergiu Celibidache
accueille les spectateurs pour faire la jonction entre les deux espaces,
rappelant le long mandat du chef roumain (1979‑1996), à même de donner
une renommée internationale à la formation.
La soirée débute avec le Concerto pour violoncelle (1970) de
Witold Lutoslawski, l’un de ses ouvrages les plus fameux, qui a trouvé
une place immédiatement prépondérante grâce à son dédicataire et
infatigable défenseur Mstislav Rostropovitch, mais aussi par son
contexte alors tragique, entre souffrances personnelles (décès de la
mère du compositeur) et troubles politiques explosifs en Pologne. Le
début minimaliste et sombre, confié au violoncelle solo, fait entendre
une seule note reprise en scansion, qui revient tout du long comme un
écho sinistre. L’atmosphère oppressante et lancinante est brutalement
interrompue par les appels dissonants des trompettes, avec les cordes en
pizzicati : de quoi lancer le discours d’ensemble, qui met en valeur
une palette subtile de sonorités, admirablement étagées par le chef
Krzysztof Urbanski. La partition n’évite pas un aspect séquentiel, mais
reste toujours passionnante par son inventivité et ses traits de détail
inattendus. Lorsqu’une mélodie toute d’hésitation tonale vient à émerger
aux cordes, le compositeur la pare de glissandi aussi inquiétants les
uns que les autres, évoquant certaines musiques de film d’horreur. La
direction précise d’Urbanski est un régal dans ce contexte, en
identifiant l’expression par blocs, menant à des tutti d’une force
émotionnelle irrespirable. Sol Gabetta est d’emblée au diapason, en un
mélange de finesse d’expression dans les piani et de virtuosité
toujours maîtrisée dans les parties plus emphatiques. En bis, elle
interprète avec trois violoncellistes du rang Le Chant des oiseaux catalan jadis popularisé par Pablo Casals.
Après l’entracte, Krzysztof Urbanski abandonne toute partition pour
embrasser de ses gestes spectaculaires et de son énergie, les moindres
détails de la Septième Symphonie (1885) de Dvorák : ses tutti
très articulés, parfois massifs dans les oppositions entre pupitres,
trouvent une urgence bienvenue dans les attaques dramatiques et
volontairement sèches. Un élan plus brahmsien s’épanouit dans les
passages lyriques, aux transitions fluides, qui conduisent naturellement
à l’expressivité mélodique de l’Adagio, avec flûte et hautbois
en avant. Quelques nuages viennent obscurcir l’horizon dans les graves,
mais Urbanski garde toujours l’équilibre entre valorisation analytique
et conduite du discours d’ensemble, notamment à la fin du mouvement,
délicatement murmurée aux cordes. La volonté d’allégement est plus
encore perceptible pour apporter une élégance féline au Scherzo, même si
la fin du Trio manque de mystère. Le Finale, structuré dans
l’élaboration virtuose de ses verticalités entremêlées, convient bien au
chef polonais, qui met en avant le discours principal conduit par les
cordes, avant la péroraison finale toute de majesté contenue.
Parce que la culture se conjugue sous plusieurs formes, il sera sujet ici de cinéma, de littérature, de musique, de spectacles vivants, selon l'inconstante fantaisie de son auteur
dimanche 28 avril 2024
Concert de l'Orchestre philharmonique de Munich - Krzysztof Urbanski - Isarphilharmonie à Munich - 27/04/2024
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