vendredi 26 avril 2024

Concert de l'Orchestre symphonique de la Radio de Hesse - Nicholas Collon - Alte Oper à Francfort - 25/04/2024

Nicholas Collon

Fondé en 1929, l’Orchestre symphonique de la Radio de Hesse (anciennement appelé Orchestre symphonique de la Radio de Francfort) a connu une renommée internationale grâce à l’intégrale Mahler gravée par son chef Eliahu Inbal, dans les années 1980. Depuis, la formation a su s’attacher des chefs aussi éminents que Paavo Järvi ou Alain Altinoglu (actuellement en poste), tout en faisant appel à plusieurs chefs invités au long de la saison, comme c’est le cas pour le présent concert avec le chef britannique Nicholas Collon (né en 1983). En dehors de la hr‑Sendesaal (840 places), la plupart des concerts ont lieu à l’Alte Oper, qui ne doit pas être confondue avec la salle de l’Opéra, située à quelques encablures de la gare. Le bâtiment a été reconstruit à l’identique dans les années 1970 pour ce qui est de son aspect extérieur, tout en offrant deux auditoriums modernes à l’intérieur, respectivement de 700 et 2 500 places.

C’est bien entendu dans la grande salle que le concert débute, avec la courte pièce symphonique Chorale (2002) de Magnus Lindberg. Le compositeur finlandais y oppose de grands effets de masse entre les pupitres : les mélodies se superposent en une atmosphère volontiers planante, qui s’achève dans la sérénité. Le contraste n’en est que plus saisissant avec le langage plus pointilliste de l’Estonien Erkki‑Sven Tüür (né en 1959), pour la création allemande de son Troisième Concerto pour violon « Entretiens avec l’inconnu ». Il s’agit là d’une nouvelle commande de l’Orchestre symphonique de la Radio de Hesse auprès de ce compositeur, après son Premier Concerto pour violon en 1999 (créé à Paris en 2004), son Concerto pour piano en 2006 et sa Septième Symphonie en 2009. Tüür fait l’étalage de toute sa maîtrise de la forme dans un ouvrage assez étendu (37 minutes jouées d’un seul tenant), en un langage expressif et coloré qui fuit la consonance. C’est peu dire que le violon engagé de Vadim Gluzman, qui a créé l’œuvre à Salem (Oregon) le 27 janvier dernier, relève le défi de la virtuosité, sachant aussi unifier les différents aspects séquentiels par son attention aux transitions. Il est bien aidé par les sonorités splendides des autres musiciens, admirablement étagées par Nicholas Collon, ce qui confirme que cette formation est bien l’une des meilleures d’Allemagne, à l’instar de ses équivalents à Berlin ou Munich.

Après l’entracte, les forces telluriques convoquées par Richard Strauss pour la Symphonie alpestre (1915) trouvent en Nicholas Collon un interprète davantage intéressé par la musique pure, au détriment du narratif, caractéristique qu’on avait déjà pu observer lors d’un concert qu’il avait dirigé à Lyon en 2019. Des tempi enlevés viennent ainsi dynamiser toute la formation, en une lecture qui fuit respiration et hédonisme, pour offrir un pont inattendu avec les audaces rythmiques de Hindemith. Les parties apaisées se montrent plus attentives aux détails, là où les tutti déchaînés mettent tous les groupes d’instruments sur un même plan sonore, n’évitant pas une certaine cacophonie par endroits. Les cordes chauffées à blanc ne ménagent pas leur investissement, en des attaques souvent nerveuses. Dans cette optique, la déflagration des tutti ne laisse que peu de place à la mélodie, évitant tout kitsch, mais laisse un arrière‑goût de sécheresse émotionnelle pour le moins décevant. Si le style est contestable, en fonction des attentes, la réalisation orchestrale touche au but, grâce à l’excellence des cors et trompettes notamment, accueillis par des applaudissements aussi enthousiastes que mérités. On reviendra certainement entendre cette superbe formation, mais avec un autre chef.

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