Déjà la onzième mise en scène d’un ouvrage d’Offenbach pour Laurent
Pelly! On se souvient notamment de l’excellente production du Roi Carotte (1872) donnée ici même voilà trois ans, avant une opportune reprise lilloise l’an passé. Alors que l’on fête cette année le bicentenaire de la naissance du compositeur franco-allemand, place cette fois à Barbe-Bleue
(1866), l’un des ouvrages les plus réussis de son auteur du fait d’une
inspiration musicale variée et admirablement adaptée aux différents
climats en présence, le tout sans aucun temps morts. Dans la lignée
parodique des aventures rocambolesques de La Belle Hélène, créé
deux ans plus tôt, Offenbach s’attaque avec bonheur au Moyen Age, sans
oublier de distiller une multitude d’allusions critiques au régime alors
en place, celui de Napoléon III. Aujourd’hui, la modernisation du texte
permet de donner une actualité toujours vibrante à ce livret excellent,
faisant regretter que l’ouvrage soit encore trop peu joué en France
(voir notamment à Nancy et Nantes en 2014), comme à l’étranger (voir la production controversée de Stefan Herheim à Berlin en 2018).
Parmi les grandes réussites de l’ouvrage, on ne s’étonnera pas de s’esclaffer sur la ronde (aussi universelle et qu’éternelle) des courtisans, ridiculisés autant par eux-mêmes que par le cruel Roi Bobèche, tandis que l’on s’amuse à reconnaitre l’actuel Premier ministre Edouard Philippe dans les traits de l’opportuniste et flexible Comte Oscar. Il est vrai que Laurent Pelly n’a pas son pareil pour caractériser finement chaque personnage afin de lui donner une consistance propre – du sinistre Barbe-Bleue à l’insolente et insouciante Boulotte, sans parler de la monarchie d’opérette aussi lâche que frivole, à l’instar du bon peuple, tout aussi impuissant dans son aveuglement passif. Pelly n’oublie pas d’égratigner ce dernier en donnant à voir son addiction aux journaux people – miroir aux alouettes garni de strass et paillettes. Mais c’est surtout dans la direction d’acteur que la mise en scène se distingue, tout particulièrement dans la gestion du chœur, véritable protagoniste de la farce avec ses nombreuses mimiques et chorégraphies millimétrées. Pelly reste toujours au plus près des intentions du livret, livrant une interprétation aussi fidèle que réjouissante, qui joue sur l’opposition volontairement caricaturale entre le monde de la ferme et les appartements royaux, tout en donnant aux oubliettes de Barbe-Bleue de faux airs d’antre de Frankenstein ou Dracula.
Parmi les grandes réussites de l’ouvrage, on ne s’étonnera pas de s’esclaffer sur la ronde (aussi universelle et qu’éternelle) des courtisans, ridiculisés autant par eux-mêmes que par le cruel Roi Bobèche, tandis que l’on s’amuse à reconnaitre l’actuel Premier ministre Edouard Philippe dans les traits de l’opportuniste et flexible Comte Oscar. Il est vrai que Laurent Pelly n’a pas son pareil pour caractériser finement chaque personnage afin de lui donner une consistance propre – du sinistre Barbe-Bleue à l’insolente et insouciante Boulotte, sans parler de la monarchie d’opérette aussi lâche que frivole, à l’instar du bon peuple, tout aussi impuissant dans son aveuglement passif. Pelly n’oublie pas d’égratigner ce dernier en donnant à voir son addiction aux journaux people – miroir aux alouettes garni de strass et paillettes. Mais c’est surtout dans la direction d’acteur que la mise en scène se distingue, tout particulièrement dans la gestion du chœur, véritable protagoniste de la farce avec ses nombreuses mimiques et chorégraphies millimétrées. Pelly reste toujours au plus près des intentions du livret, livrant une interprétation aussi fidèle que réjouissante, qui joue sur l’opposition volontairement caricaturale entre le monde de la ferme et les appartements royaux, tout en donnant aux oubliettes de Barbe-Bleue de faux airs d’antre de Frankenstein ou Dracula.
Si Yann Beuron (Barbe-Bleue) a pour lui des phrasés irrésistibles de mordant et de noirceur dans les graves, on pourra cependant lui reprocher un timbre moins souverain dans l’aigu et les accélérations. Quoiqu’il en soit, ses qualités d’acteur font rapidement oublier ces quelques limites au niveau vocal. On lui préfère la Boulotte d’Héloïse Mas, elle-aussi dotée de graves splendides, tout en assurant bien sur le reste de la tessiture. Sa composition de nymphomane est un régal de bout en bout, vivement applaudie par le public venu en nombre. A ses côtés, Christophe Mortagne se montre une fois encore parfait dans le rôle essentiellement parlé de Bobèche, alternant subtilement entre morgue et airs ahuris. Très engagés au niveau vocal, Thibault de Damas (Oscar) et Christophe Gay (Popolani) donnent une noblesse inattendue à leurs personnages, qui gagnent ici en profondeur ce qu’ils perdent en possibilités comiques. Si Carl Ghazarossian (Saphir) manque quelque peu de chair au niveau vocal, que dire de la petite voix de Jennifer Courcier (Fleurette), inaudible par endroits? C’est là la principale faiblesse de ce plateau vocal d’un bon niveau homogène.
On soulignera encore la bonne prestation du chœur, bien en place, tandis que Michele Spotti insuffle une belle énergie à ses troupes, se montrant aussi à l’aise dans la vigueur rythmique que la mise en valeur des subtilités orchestrales. Assurément l’une des clefs de la belle réussite de cette production qu’il sera également possible de voir gratuitement sur grand écran, dans le cadre des nuits de Fourvière, le samedi 29 juin à 21 heures 45.
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