dimanche 2 février 2020

Oeuvres de Schubert et R. Strauss - Domingo Hindoyan - Orchestre National Bordeaux Aquitaine - 30/01/2020

Domingo Hindoyan
Il ne faut pas se laisser tromper aux airs de jeune premier du chef vénézuélien Domingo Hindoyan (39 ans), découvert en France voilà déjà dix ans avec l'Orchestre Pasdeloup et qui officie souvent depuis dans le domaine lyrique – le plus souvent avec son épouse Sonya Yoncheva (voir notamment à Baden-Baden ou à Montpellier). Issu du programme El Sistema, le jeune homme visiblement doué dirige tout au long de la soirée sans partition, sous le regard attentif du directeur musical Paul Daniel, dans le public. Le programme débute sous les hospices de l’originalité, avec deux œuvres de Schubert et Richard Strauss peu visitées au concert comme au disque. L’Ouverture dans le style italien (1817) constitue une parfaite mise en bouche, avec son introduction lente et majestueuse qui rappelle la manière du dernier Haydn, avant une envolée plus guillerette en seconde partie. Avec des tempi assez lents au début, pour mieux lâcher les chevaux ensuite, Hindoyan joue la carte du contraste dynamique, sans jamais se départir d’une parfaite mise en place.

Le tout aussi méconnu Duo concertant pour clarinette et basson, avec orchestre à cordes et harpe (1947) permet de reconnaître d’emblée la pâte sonore de Richard Strauss, entre raffinement du tissu orchestral et lyrisme enveloppant. Après les douceurs initiales de la clarinette, le basson se fait plus narratif en rupture, tandis que les cordes apportent un soutien de velours, toujours au service des solistes. Le sommet de la partition se situe dans le superbe passage éthéré où le basson s’apaise pour mieux répondre à la harpe délicate en arrière-plan. On notera toutefois une différence audible dans le style des deux solistes, le basson charnu et entier d’Anne-Sophie Frémy répondant à la clarinette plus poétique de Sebastien Batut. En bis, le public se régale d’une transcription d’un extrait de Casse-Noisette, aussi piquante que délicieuse.

C’est toutefois après l’entracte que le plat de résistance permet à Hindoyan de déployer toutes les facettes de son style interprétatif: si les passages lents paraissent un rien flottants, c’est bien davantage dans les parties verticales, très vives, que le Vénézuélien se montre le plus convaincant. Son geste fait fi de toute respiration pour mieux imbriquer les vagues successives qui irriguent chaque pupitre de cordes – tous très engagés à l’exception notable des premiers violons, plus en retrait. Dès lors, sans jamais sacrifier la mélodie principale, les vents ressortent admirablement, en une fulgurance sans temps mort. Il en ressort un indéniable panache, qui culmine dans un dernier mouvement particulièrement réussi du fait de l’attention louable à la pulsation rythmique. Un rien robuste par endroits, cette interprétation physique sied parfaitement à l’excitation attendue du concert. Le public ne s’y trompe pas en réservant un accueil chaleureux à l’ensemble des interprètes, chef compris.

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