vendredi 4 octobre 2024

Concert de l’Orchestre national de Lyon - Leonard Slatkin - Auditorium de Lyon - 03/10/2024

Leonard Slatkin

L’Orchestre national de Lyon ne pouvait manquer de fêter le quatre-vingtième anniversaire de son directeur musical honoraire, Leonard Slatkin (né en 1944), qui reste aujourd’hui encore l’un des chefs les plus appréciés par les musiciens, suite à son mandat (2011‑2017) dans la capitale des Gaules. L’une des particularités du Californien est précisément d’avoir ouvert la formation au répertoire de son pays, et ce dès 2011 et la série de concerts « L’Amérique de Leonard Slatkin », puis régulièrement ensuite (voir notamment en 2017 l’une des soirées consacrées à la musique symphonique de John Adams).

C’est dans cet esprit que la première partie de soirée fait découvrir une page (d’environ douze minutes), appelée Timepiece, de Cindy McTee (née en 1953). L’épouse de Leonard Slatkin, compositrice et professeur de musique, n’a pas son pareil pour convoquer toutes les ressources de l’orchestre en un brio allant, alternant ambiance mystérieuse et verticalités abruptes (à l’orchestration marquée par les percussions), pour mieux revenir à des passages sinueux aux cordes, mêlés d’un sentiment d’urgence qui donne toujours envie d’entendre la suite. La compositrice vient sur scène pour recueillir des applaudissements nourris de la part du public, agréablement surpris par cette entrée en matière au tonus revigorant.


Le contraste n’en est que plus marqué avec la pièce plus connue qui suit, le Second Concerto pour violoncelle (1966) de Chostakovitch et son ambiance sombre et dépouillée. Comme à son habitude, Leonard Slatkin ne s’embarrasse pas d’un excès de pathos, entre lisibilité et sens de la mise en place. Le soliste, Sheku Kanneh‑Mason, (né en 1999) est sur la même longueur d’onde en privilégiant des phrasés gracieux et aériens, qui mettent en valeur l’expression des timbres. L’élan narratif comme les grincements volontiers narquois restent toutefois au second plan d’une interprétation un rien séquentielle, où le violoncelliste britannique se fond parfois volontairement dans la masse des tutti, sans virtuosité expansive. En bis, il surprend en rendant hommage à Bob Marley via l’adaptation de l’une de ses chansons, She used to call me Dada.

Après l’entracte, la Troisième Symphonie (1946) de Copland résonne de toute sa force expressive, volontiers massive dans ses grands phrasés homophoniques opposés par bloc, à la manière du classicisme altier de la Cinquième Symphonie de Prokofiev, composée un an plus tôt. Leonard Slatkin ne s’embarrasse pas de détails en imprimant des tempi assez vifs, sans attaques sèches. Il réussit davantage les passages majestueux, grâce à la clarté des lignes de l’excellent Orchestre national de Lyon, très bien préparé pour l’occasion. Si les parties plus lyriques et apaisées manquent d’un rien de rebond et de fantaisie, on reste toutefois solidement arrimé au geste du chef américain, toujours sur et précis. Parmi les morceaux de bravoure du compositeur, le finale inoubliable revisite la célèbre Fanfare pour l’Homme ordinaire, composée en 1942 pour accompagner l’entrée en guerre des Etats‑Unis. L’élan patriotique évite toutefois tout pompiérisme, en mettant en valeur l’imagination mélodique de Copland, très inspiré ici. La charge émotionnelle, qui monte peu à peu et empoigne tout du long l’auditeur, explique pourquoi cet ouvrage reste l’un des plus populaires de son auteur : sa découverte en concert, à l’instar des « symphonies de guerre » tout aussi spectaculaires de Chostakovitch, est un moment incomparable pour l’auditeur. De quoi expliquer pourquoi l’Orchestre national de Lyon a réservé deux dates à ce programme, avant de retrouver le même Slatkin pour d’autres œuvres originales le 11 octobre, cette fois de Gershwin, Barber et... Slatkin. Enjoy! 

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